
Loin de la combativité du prolétariat d’antan, les nouveaux pauvres se muent en abstentionnistes. Un danger pour la paix sociale.
La Mauritanie n’est pas un pays pauvre, mais la pauvreté ne cesse d’augmenter. C’est cependant une pauvreté bien différente de celle du XIXe siècle. Il n’y a plus de classe de pauvres, de prolétaires susceptibles de s’unir pour lutter. Les pauvres d’aujourd’hui sont certes unis par leur statut social mais pas par leur milieu social. Les pauvres d’aujourd’hui n’ont plus de porte-voix, ce que les syndicats étaient jadis pour la classe ouvrière. Ils n’ont plus de fierté, plus de sentiment d’appartenance commune ; ils jouent chacun pour soi, et s’en sortent misérablement. La pauvreté d’aujourd’hui a beaucoup de visages : il y a l’universitaire au chômage, il y a le travailleur occasionnel, le travailleur délocalisé, la mère isolée qui ne parvient plus à reprendre pied dans la vie professionnelle ; il y a les laissés-pour-compte de toujours repoussés en marge de la société ; il y a l’ingénieur diplômé, déclaré trop vieux et tombé dans le chômage de longue durée ; il y a la caissière qui travaille quelques heures par-ci par-là ; il y a de milliers d’étrangers tolérés dans le pays mais qui n’ont pas le droit de travailler et doivent vivre avec un statut totalement précaire ; il y a de milliers de déportés qui n’ont pas réussi à s’intégrer dans la société. Tous ces gens relativement pauvres n’ont pas grand-chose en commun. La pauvreté, répétons-le, n’est plus un monde homogène, voilà pourquoi, jusqu’à présent, elle n’a pas trouvé son expression politique. Si les nouveaux pauvres constituent aujourd’hui un parti, c’est le parti des abstentionnistes. Il ne cesse de grandir mais ne représente aucune force politique. Il y a tout lieu de craindre qu’il ne développe, précisément pour cette raison, une énergie destructrice : une démocratie ne saurait fonctionner correctement quand une partie croissante de la société n’y prend pas part. La démocratie à deux vitesses représente une menace pour la paix intérieure.
Zeine Yedali
Source: Biladi
La Mauritanie n’est pas un pays pauvre, mais la pauvreté ne cesse d’augmenter. C’est cependant une pauvreté bien différente de celle du XIXe siècle. Il n’y a plus de classe de pauvres, de prolétaires susceptibles de s’unir pour lutter. Les pauvres d’aujourd’hui sont certes unis par leur statut social mais pas par leur milieu social. Les pauvres d’aujourd’hui n’ont plus de porte-voix, ce que les syndicats étaient jadis pour la classe ouvrière. Ils n’ont plus de fierté, plus de sentiment d’appartenance commune ; ils jouent chacun pour soi, et s’en sortent misérablement. La pauvreté d’aujourd’hui a beaucoup de visages : il y a l’universitaire au chômage, il y a le travailleur occasionnel, le travailleur délocalisé, la mère isolée qui ne parvient plus à reprendre pied dans la vie professionnelle ; il y a les laissés-pour-compte de toujours repoussés en marge de la société ; il y a l’ingénieur diplômé, déclaré trop vieux et tombé dans le chômage de longue durée ; il y a la caissière qui travaille quelques heures par-ci par-là ; il y a de milliers d’étrangers tolérés dans le pays mais qui n’ont pas le droit de travailler et doivent vivre avec un statut totalement précaire ; il y a de milliers de déportés qui n’ont pas réussi à s’intégrer dans la société. Tous ces gens relativement pauvres n’ont pas grand-chose en commun. La pauvreté, répétons-le, n’est plus un monde homogène, voilà pourquoi, jusqu’à présent, elle n’a pas trouvé son expression politique. Si les nouveaux pauvres constituent aujourd’hui un parti, c’est le parti des abstentionnistes. Il ne cesse de grandir mais ne représente aucune force politique. Il y a tout lieu de craindre qu’il ne développe, précisément pour cette raison, une énergie destructrice : une démocratie ne saurait fonctionner correctement quand une partie croissante de la société n’y prend pas part. La démocratie à deux vitesses représente une menace pour la paix intérieure.
Zeine Yedali
Source: Biladi