Mohamed Ould Abdel Aziz - Macky Sall : Pourquoi les deux hommes devaient se rencontrer



Mohamed Ould Abdel Aziz - Macky Sall : Pourquoi les deux hommes devaient se rencontrer
Après un court séjour en Gambie, le président sénégalais Macky Sall consacre sa seconde visite dans la sous région à la Mauritanie. Ce sera aujourd’hui dimanche 16 septembre 2012. Programmation normale et impérative, au regard des nombreux problèmes qui n’ont cessé d’ébranler les relations entre les deux pays, pendant ces derniers mois.

Maintes fois annoncée et reportée, la visite officielle en Mauritanie du tout nouveau président sénégalais est désormais effective. Macky Sall sera en effet aujourd’hui l’hôte du président Mohamed Ould Abdel Aziz ! Les deux hommes, appelés à gérer des relations séculaires -mais très délicates depuis quelques années- entre leurs deux peuples frontaliers se sont pourtant rencontré à deux reprises : une brève entrevue pendant la cérémonie d’investiture du président Macky Sall à Dakar et une réunion éclaire organisée par l’entremise de l’ancien ministre sénégalais des Affaires étrangères, M. Gadio, au Royaume d’Arabie saoudite lors du sommet de l’OCI le mois dernier. Deux tête-à-tête qui n’ont pas permis d’évacuer les nombreux dossiers chauds qui se dressent devant le renforcement de la coopération entre les deux pays.

Des dossiers à dépoussiérer

Parmi les écueils qui grippent les relations mauritano-sénégalaises, la sécurité des personnes et des biens ou plus précisément, les déboires rencontrés dans le secteur aérien et celui du transport terrestre, avec la rupture de charge imposée de part et d’autre de la frontière, notamment au niveau de Rosso où les forces de sécurité jouent à la surenchère au grand dam des voyageurs martyrs.

Autant les Sénégalais qui souhaitent se rendre en Mauritanie sont soumis aux exactions des gardes frontières nationales, puis aux tracasseries des différents postes de contrôle qui les obligent souvent à cracher dans le ciboire, autant les Mauritaniens qui voyagent par les routes du Sénégal sont confrontés aux mêmes humeurs, à la même immoralité, voire à la même humiliation, de la part des policiers et autres gendarmes.

Autre problème qui était à l’ordre du jour, la carte de séjour instituée en Mauritanie dont devra se munir tout étranger résidant dans le pays. De sources informées, Dakar ne compte pas établir la réciprocité dans ce domaine, à l’instar du Mali, mais les autorités sénégalaises, acculées par leurs populations, devraient œuvrer à trouver une solution consensuelle à la situation. Avec l’annulation de la redevance due en contrepartie de la carte, qui était de 30.000 UM, la gratuité du service résout ainsi ce problème qui était uniquement d’ordre financier.

Les deux chefs d’Etat profiteront de la rencontre pour parler plus globalement du problème né des déplacements du cheptel mauritanien dans les pâturages sénégalais et surtout, la présence des pêcheurs sénégalais dans les eaux mauritaniennes. Plus que la livraison de licences de pêche au profit de pêcheurs sénégalais, il s’agira là d’évoquer la sécurité des hommes en mer. Plusieurs pêcheurs sénégalais auraient essuyé, ces derniers mois, des tirs provenant de gardes côtes mauritaniens, sans compter les confiscations de matériels de pêche.

Mohamed Ould Abdel Aziz et Macky Sall devraient aussi relancer le projet du pont de Rosso envisagé par leurs prédécesseurs et qui aurait même obtenu l’aval des bailleurs.

Dos à dos.

La Mauritanie et le Sénégal, deux pays frontaliers, unis par la géographie, l’histoire et la religion, ont plus que besoin de renforcer leur coopération. Certains vont même jusqu’à dire que l’un n’est que le prolongement de l’autre, tant le mode de vie social et culturel, mais aussi politique et économique, se ressemble de part et d’autre de la frontière. Certes, les commerçants mauritaniens n’ont plus pignon sur rue au Sénégal comme avant les douloureux événements de 89. La présence mauritanienne au Sénégal s’est en effet réduite à une population estudiantine, des malades en consultation dans les hôpitaux sénégalais ou des fêtards qui se rendent à Dakar ou à Saint-Louis flamber de l’argent dans les casinos ou les night club. Par contre la communauté sénégalaise en Mauritanie a beaucoup grossi. On parle de quelques 400.000, boutés hors de leur pays par le chômage. Ici dans les villes mauritaniennes, notamment à Nouakchott et Nouadhibou, ils prolifèrent dans les travaux de toute sorte et font vivre leurs familles restées au pays. La mer et ses richesses halieutiques constituent aussi une belle aubaine pour les pêcheurs sénégalais, dont le pays profite largement aussi de la transsaharienne qui traverse la Mauritanie et assure plus de 33% des importations sénégalaises !

Sur le plan de l’énergie, le Sénégal, confronté à de multiples déficits en électricité, devrait à terme satisfaire sa demande intérieure, à partir du gaz mauritanien découvert en haute mer. Le président Macky Sall l’a avoué à plusieurs reprises. Sans complexe. En attendant, l’option est envisagée, dans le cadre de l’OMVS, de transférer à court terme, à Dakar, une partie de l’énergie mauritanienne du barrage de Manantali.

Au demeurant, Macky Sall ne discutera pas les mains vides devant son homologue mauritanien. Dakar, " ex-capitale de l’Afrique de l’ouest " possède une diplomatie solide dans le monde. A ce titre, le Sénégal pourrait aider la Mauritanie à mieux se "vendre " dans le domaine du développement, celui de la lutte contre le terrorisme et de la représentativité au sein des instances internationales. Dakar dispose aussi d’un port stratégique dans la région qui profite largement à la Mauritanie, sans compter les pâturages du Sénégal ouverts au cheptel mauritanien, régulièrement frappé par la famine et la sécheresse. Aujourd’hui, le Sénégal est l’unique ouverture de la Mauritanie vers l’Afrique de l’Ouest, le Mali étant empêtré dans une profonde crise interne. D’ailleurs, la situation au Mali occupera certainement une grande place dans les discussions entre les deux chefs d’Etat. L’’insécurité qui prévaut dans ce pays requiert en effet une plus grande coordination entre les pays frontaliers.

Un instant assombries par le cas du Mauritanien Ould Chavii que le Sénégal avait refusé de livrer aux autorités mauritaniennes lors de son passage à Dakar en visite officie, les relations entre le Sénégal et la Mauritanie devront sortir renforcées de la visite que Macky Sall entame aujourd’hui à Nouakchott.

Tout compte fait, les deux hommes n’ont pas le choix. L’exigence d’une entente est dictée par les intérêts communs mais aussi et surtout par les impératifs de développement et la menace sécuritaire.

Cheikh Aïdara.


Source:http://lauthentic.info

Mardi 18 Septembre 2012
Boolumbal Boolumbal
Lu 355 fois



Recherche


Inscription à la newsletter