Voitures d'occasion : L'Europe inonde le marché mauritanien



Voitures d'occasion : L'Europe inonde le marché mauritanien
" Bonsoir, Quelqu'un pourrait-il me dire quelles sont les voitures qui se vendent bien actuellement en Mauritanie ? Y a t'il des 4x4 qui se vendent mieux que d'autres ? Si on descend quelque chose d'assez cher, est-ce qu'il y a un marché pour ça ? Et les camions genre Mercedes 308, 508 ? Renault Master ? Je me demande si depuis qu'il y a le goudron jusqu'à Nouakchott ? Merci des réponses que vous pourriez me donner".
Vous l'aurez sans doute compris, il s'agit d'une " requête " postée sur le Net par une personne vivant en Europe qui a sans doute entendu parler du trafic intense des voitures d'occasion entre le Vieux continent et la Mauritanie.

Le phénomène qui ne date certes pas d'aujourd'hui, a pris de l'ampleur à la fin du siècle dernier. Il est loin le temps où ceux qui voulaient acheter leur première voiture se dirigeaient vers l'unique " bourse " (bourset ichems) sise au Grand marché de la Capitale. Aujourd'hui, ce lieu n'accueille plus que les voitures destinées à la casse ou dont les propriétaires veulent se débarrasser pour en trouver de meilleures. Dans cette bourse, tout se vend et s'achète : voitures, maisons, terrains, etc. C'est le lieu idéal du " tieb-tieb ". Ceux qui cherchent un véhicule " arrivage " - synonyme chez nous de voiture neuve, ils ont l'embarras du choix. Les plus belles, les plus rutilantes, mais aussi les plus chères occupent de grands espaces à Tevragh-Zeina, quartier chic de la Capitale, où elles donnent l'impression de narguer la classe bourgeoise de Nouakchott dont la voiture est devenue, avec la villa, la marque ostentatoire de richesse. Là, on retrouve toutes les marques européennes et japonaises (BMW, Mercedes, Peugeot, Renault, Volkswagen, Toyota, Nissan, Mitsubishi). Les marques américaines, qui constituent un nouveau look avec l'apparition sur les goudrons de Nouakchott de quelques Hammer, n'arrivent pas encore percer, sans doute à cause de l'éloignement du marché mauritanien du pays de l'Oncle Sam.

Pour qui cherche une voiture utilitaire, le lieu indiqué est le Carrefour Madrid. Tout au long de l'avenue allant de l'aéroport de Nouakchott au Bataillon des blindés, les abords du goudron donnent l'impression d'être un immense parking.

Dans ces bourses où les transactions s'effectuent souvent entre 17 heures et la tombée de la nuit, la Mercedes 190 est la voiture reine. Cette robuste voiture qui a détrôné au milieu des années 90 les Peugeot et autres Renault dans le domaine du transport urbain et interurbain ont vraiment conquis le cœur des automobilistes Mauritaniens. Leur robustesse reconnue mais aussi leur caractère utilitaire les mettent en dehors des petites bourses. Un bon " arrivage " se négocie entre 1.100 000 ouguiyas et 1.700.000 UM. Un prix qui pouvait être facilement amorti avant la ruée remarquée aujourd'hui vers les taxis. Les véhicules prêts à rendre l'âme sont abandonnés à presque rien (entre 50.000 et 300.000 UM). Les grosses cylindrées qui font le bonheur des riches Nouakchottois coûtent les yeux de la tête (entre 5.000 000 et 12.000 000 d'ouguiyas). De nombreux chauffeurs rencontrés se plaignent d'ailleurs de ne pouvoir respecter le " versement " de 4000 à 5000 UM que les propriétaires de voitures réclament chaque soir vers 21 heures. Les taximen, étrangers pour la plupart, mettent au cause la rude concurrence que leur font les véhicules privées, car " faire le taxi " est devenu, par les temps qui courent, un second métier qui permet aux fonctionnaires, aux sans-travail et même à quelques commerçants d'avoir un plus à la fin de chaque journée ou de chaque mois. Pour certains, c'est un mal nécessaire puisqu'il résout deux problèmes : le manque de véhicules de transports, avec la disparition, programmée de longue date par le ministère des Transports, des fameux minibus de Nouakchott, et la résorption du chômage qui touche une bonne frange de la population active du pays.


Les filières de trafic

Il est loin le temps où les voitures, neuves, ou de seconde main, étaient acheminées à partir du Sénégal. Un ancien fonctionnaire du ministère des Finances dit avoir importé sa première voiture, en 1969, de la capitale de notre voisin du sud où tous les concessionnaires français avaient établi des représentations. Le trafic de voitures à partir du Sénégal, mais aussi la réparation " sérieuse " devaient continuer jusqu'au moment où les Mauritaniens découvrent les joies de la voiture importée directement d'Europe (Belgique, France, Allemagne, Espagne) et de la filière marocaine.

L'essentiel des voitures qu'on expose aujourd'hui dans les bourses de Nouakchott arrive de ces villes d'Europe, via le Maroc, où un commerce florissant s'est établi. La voie royale pour ce trafic a longtemps était celle des routes cahoteuses du Sahara et du désert mauritanien. Actuellement, nous dit un importateur " occasionnel ", la pression de la Douane mauritanienne, à l'entrée de la ville de Nouadhibou est devenue tellement forte que certains ne veulent plus courir le risque. Même les touristes qui viennent et repartent sans leurs voitures connaissent maintenant ce que d'aucuns qualifient de tracasseries administratives alors qu'il s'agit tout simplement d'une règlementation stricte en Mauritanie. A son passage en douane, le touriste doit signer un engagement sur l'honneur de quitter le territoire Mauritanien avec son véhicule, qui sera marqué sur ton passeport.

Pour ce jeune businessman, les concessionnaires locaux y sont sans doute pour quelque chose, pensant que le commerce des voitures d'occasion leur fait une concurrence déloyale. Une allusion peut-être à l'augmentation des frais de dédouanement des véhicules d'occasion qui peuvent atteindre, semble-t-il, la moitié du prix d'achat de la voiture !

Entre les concessionnaires et les vendeurs des voitures d'occasion, le torchon a commencé à brûler quand l'Etat (Administration et entreprises publiques), principal client des représentations des grandes marques européennes, a commencé à passer commande chez les vendeurs d'occasion ! Un empiétement sur la chasse gardée des vendeurs de voitures neuves qui offrent l'occasion, semble-t-il, de saigner le Trésor public par l'usage de la surfacturation dans laquelle le client trouve son compte. Les voitures qui transitent par le Port Autonome de Nouakchott sont, de plus en plus, à usage personnel (un étudiant, un fonctionnaire ou travailleur immigré qui rentre au pays). Les autres (ceux qui font de ce commerce le meilleur moyen de s'enrichir rapidement) continuent à choisir l'axe Europe - Maroc - Mauritanie. A leurs risques et périls.


Source: L'authentique

Vendredi 19 Février 2010
Boolumbal Boolumbal
Lu 1666 fois



Recherche


Inscription à la newsletter