La Mauritanie est devenue depuis le 13 janvier 2010, le 65ème pays membre de l'Organisation des Nations Unies à reconnaître l'indépendance du Kosovo, proclamée le 17 février 2008 contre la volonté de la Serbie qui continue à réclamer ce territoire. L'information est passée presque inaperçue, traitée laconiquement jusque-là au détour de quelques dépêches d'agences. Pourquoi la Mauritanie reconnaît-elle le Kosovo ? Raisons politiques ou simple solidarité musulmane ?
Alors que les défis sont encore énormes pour la Mauritanie, tout juste sortie d'une crise politique et institutionnelle qui lui impose un rafistolage diplomatique tous azimuts pour ramener la confiance des partenaires, les autorités mauritaniennes ont, toutes affaires cessantes, jugé urgent de reconnaître un territoire situé à l'autre bout de l'Europe et dont le sort a toujours été le cadet des soucis de ce côté-ci de l'Atlantique. Et ce n'est pas la sempiternelle thèse de la grande fraternité islamique qui viendra y changer quelque chose.
Certes, le Kosovo est un territoire en majorité musulmane de rite sunnite, depuis l'invasion Ottomane et la mainmise du Sultan Mourad sur la presque totalité des Balkans au milieu du 14ème siècle, mais le devoir religieux seul ne suffit pas à expliquer la note verbale du 13 janvier 2010 par laquelle l'Etat mauritanien reconnaît la République de Kosovo et lui signifie sa disponibilité à établir des relations diplomatiques.
L'engrenage
Qu'est-ce qui explique en effet ce soudain élan d'affection pour ce territoire d'à peine 11.000 kilomètres carrés, tout juste peuplé de 3 millions d'habitants et l'un des plus pauvres de la planète et qui peine à réunir le quota de reconnaissance minimum de 97 Etats pour intégrer l'ONU ? Quel intérêt à implanter une ambassade dans une République hors de sa sphère traditionnelle quand la Mauritanie est incapable d'en entretenir dans des pays beaucoup plus proches et à impact réel sur son développement, comme l'Angleterre, le Canada, l'Iran, la Turquie, l'Irak ou le Gabon, mais aussi tous les grands pays de l'ex-bloc de l'Est (Bulgarie, Hongrie, Tchéquie et Slovaquie…) entre autres ?
D'ailleurs, pourquoi New York devait-elle abriter la cérémonie de lancement d'une telle démarche et non Nouakchott ou Pristina ? De là à deviner l'entremise du Département d'Etat dans la sauce diplomatique mauritanienne, en contrepartie d'on ne sait quelle facilité, il n'y a qu'un pas qu'on ne peut s'empêcher de franchir. D'autant plus qu'on se rappelle les conditions dans lesquelles la Mauritanie avait établi des relations diplomatiques avec Israël, sur la pression des Etats-Unis. Si dans ce dernier cas, les USA et le lobby juif s'étaient engagés (avec une réussite si brillante) à aider la Mauritanie à se refaire une nouvelle virginité sur le plan de la démocratie et des droits de l'homme après avoir été longtemps mise sur la sellette internationale, la contrepartie dans la reconnaissance du Kosovo serait l'appui que le bloc Occidental pourrait apporter au régime actuel, en bute à la réticence des partenaires internationaux et à sa propre opposition.
En effet, le problème du Kosovo est une carte diplomatique que les Etats-Unis, la France, l'Allemagne et la Grande Bretagne, entre autres puissances occidentales, jouent sur le front des balkans pour contrer les velléités de la Russie, aidé par ses alliés dont la Chine, à recomposer son royaume perdu des Balkans à partir d'une entité serbe solide et hégémonique. .
Le poids des béni oui-oui
Ainsi, sur les 27 pays de l'Union Européenne et sur les 11 pays de l'OCDE, respectivement 22 et 10 ont reconnu l'indépendance du Kosovo, alors que sur les 10 pays membres de la CEI (Communauté des Etats indépendants, formant l'ancien bloc de l'Union Soviétique), 8 se sont opposés, 1 est resté neutre et 1 ne s'est pas prononcé.
D'autre part, les pays musulmans membres de l'Organisation de la Conférence Islamique (OCI) sont divisés sur la position à prendre par rapport à l'indépendance du Kosovo. Sur les 56 pays membres de l'OCI, seuls 13 pays ont reconnu l'indépendance du territoire. Il s'agit de l'Afghanistan, de l'Arabie Saoudite, de Bahreïn, du Burkina Faso, des Comores, des Emirats Arabes Unis, de la Gambie, de la Jordanie, de la Malaisie, des Maldives, de la Mauritanie, du Sénégal et de la Sierra Léone. D'autres Etats membres de l'OCI se disent favorables à l'indépendance du Kosovo et projettent de déclarer tôt ou tard leur reconnaissance, notamment le Bangladesh, l'Indonésie, Oman, Pakistan, Qatar et le Yémen.
Par contre, 30 pays se sont dits farouchement opposés à l'indépendance du Kosovo et excluent toute reconnaissance. Il s'agit de 5 pays européens dont l'Espagne et de 8 pays de l'OCI que sont l'Algérie, le Maroc, l'Iran, la Libye, l'Azerbaïdjan, le Kazakhstan, le Kirghizistan et le Tadjikistan. Si la position de ces quatre derniers pays peut s'expliquer par leur relation historique avec la Russie, celle de certains autres Etats peut se comprendre par leur crainte de légitimer des volontés séparatistes sur leur propre territoire, comme l'Espagne avec les Basques, ou le Maroc en bute à la volonté d'indépendance des Sahraouis. Par contre, l'attitude de l'Algérie pourrait surprendre, si l'on se réfère à ses combats historiques retentissants pour l'autodétermination des peuples, sauf si sa position n'était dictée par les fortes relations historiques et idéologiques qui la lient à la Russie.
Ainsi, la reconnaissance du Kosovo, loin d'être une finalité de politique étrangère pour la Mauritanie, même si les théologiens du régime peuvent l'enrober sous le couvert de la solidarité islamique, n'en est pas moins qu'une carte de plus dans le jeu géostratégique des grandes puissances et dans laquelle un pays comme la Mauritanie n'est qu'un minuscule grain de sable, avec toute la faiblesse de ce dérisoire matériau, mais sans sa capacité d'enrayer l'engrenage. Ne dit-on pas que les ambitions des peuples ne doivent pas dépasser leurs capacités réelles ? Et pourtant, c'est aussi valable en diplomatie. Et au delà, avons-nous la vision qu'il faut et surtout les hommes (ou femmes) en mesure de traduire tout cela sur le terrain à travers de véritables actes qui portent notre marque ? !
Source: l'authentique
Alors que les défis sont encore énormes pour la Mauritanie, tout juste sortie d'une crise politique et institutionnelle qui lui impose un rafistolage diplomatique tous azimuts pour ramener la confiance des partenaires, les autorités mauritaniennes ont, toutes affaires cessantes, jugé urgent de reconnaître un territoire situé à l'autre bout de l'Europe et dont le sort a toujours été le cadet des soucis de ce côté-ci de l'Atlantique. Et ce n'est pas la sempiternelle thèse de la grande fraternité islamique qui viendra y changer quelque chose.
Certes, le Kosovo est un territoire en majorité musulmane de rite sunnite, depuis l'invasion Ottomane et la mainmise du Sultan Mourad sur la presque totalité des Balkans au milieu du 14ème siècle, mais le devoir religieux seul ne suffit pas à expliquer la note verbale du 13 janvier 2010 par laquelle l'Etat mauritanien reconnaît la République de Kosovo et lui signifie sa disponibilité à établir des relations diplomatiques.
L'engrenage
Qu'est-ce qui explique en effet ce soudain élan d'affection pour ce territoire d'à peine 11.000 kilomètres carrés, tout juste peuplé de 3 millions d'habitants et l'un des plus pauvres de la planète et qui peine à réunir le quota de reconnaissance minimum de 97 Etats pour intégrer l'ONU ? Quel intérêt à implanter une ambassade dans une République hors de sa sphère traditionnelle quand la Mauritanie est incapable d'en entretenir dans des pays beaucoup plus proches et à impact réel sur son développement, comme l'Angleterre, le Canada, l'Iran, la Turquie, l'Irak ou le Gabon, mais aussi tous les grands pays de l'ex-bloc de l'Est (Bulgarie, Hongrie, Tchéquie et Slovaquie…) entre autres ?
D'ailleurs, pourquoi New York devait-elle abriter la cérémonie de lancement d'une telle démarche et non Nouakchott ou Pristina ? De là à deviner l'entremise du Département d'Etat dans la sauce diplomatique mauritanienne, en contrepartie d'on ne sait quelle facilité, il n'y a qu'un pas qu'on ne peut s'empêcher de franchir. D'autant plus qu'on se rappelle les conditions dans lesquelles la Mauritanie avait établi des relations diplomatiques avec Israël, sur la pression des Etats-Unis. Si dans ce dernier cas, les USA et le lobby juif s'étaient engagés (avec une réussite si brillante) à aider la Mauritanie à se refaire une nouvelle virginité sur le plan de la démocratie et des droits de l'homme après avoir été longtemps mise sur la sellette internationale, la contrepartie dans la reconnaissance du Kosovo serait l'appui que le bloc Occidental pourrait apporter au régime actuel, en bute à la réticence des partenaires internationaux et à sa propre opposition.
En effet, le problème du Kosovo est une carte diplomatique que les Etats-Unis, la France, l'Allemagne et la Grande Bretagne, entre autres puissances occidentales, jouent sur le front des balkans pour contrer les velléités de la Russie, aidé par ses alliés dont la Chine, à recomposer son royaume perdu des Balkans à partir d'une entité serbe solide et hégémonique. .
Le poids des béni oui-oui
Ainsi, sur les 27 pays de l'Union Européenne et sur les 11 pays de l'OCDE, respectivement 22 et 10 ont reconnu l'indépendance du Kosovo, alors que sur les 10 pays membres de la CEI (Communauté des Etats indépendants, formant l'ancien bloc de l'Union Soviétique), 8 se sont opposés, 1 est resté neutre et 1 ne s'est pas prononcé.
D'autre part, les pays musulmans membres de l'Organisation de la Conférence Islamique (OCI) sont divisés sur la position à prendre par rapport à l'indépendance du Kosovo. Sur les 56 pays membres de l'OCI, seuls 13 pays ont reconnu l'indépendance du territoire. Il s'agit de l'Afghanistan, de l'Arabie Saoudite, de Bahreïn, du Burkina Faso, des Comores, des Emirats Arabes Unis, de la Gambie, de la Jordanie, de la Malaisie, des Maldives, de la Mauritanie, du Sénégal et de la Sierra Léone. D'autres Etats membres de l'OCI se disent favorables à l'indépendance du Kosovo et projettent de déclarer tôt ou tard leur reconnaissance, notamment le Bangladesh, l'Indonésie, Oman, Pakistan, Qatar et le Yémen.
Par contre, 30 pays se sont dits farouchement opposés à l'indépendance du Kosovo et excluent toute reconnaissance. Il s'agit de 5 pays européens dont l'Espagne et de 8 pays de l'OCI que sont l'Algérie, le Maroc, l'Iran, la Libye, l'Azerbaïdjan, le Kazakhstan, le Kirghizistan et le Tadjikistan. Si la position de ces quatre derniers pays peut s'expliquer par leur relation historique avec la Russie, celle de certains autres Etats peut se comprendre par leur crainte de légitimer des volontés séparatistes sur leur propre territoire, comme l'Espagne avec les Basques, ou le Maroc en bute à la volonté d'indépendance des Sahraouis. Par contre, l'attitude de l'Algérie pourrait surprendre, si l'on se réfère à ses combats historiques retentissants pour l'autodétermination des peuples, sauf si sa position n'était dictée par les fortes relations historiques et idéologiques qui la lient à la Russie.
Ainsi, la reconnaissance du Kosovo, loin d'être une finalité de politique étrangère pour la Mauritanie, même si les théologiens du régime peuvent l'enrober sous le couvert de la solidarité islamique, n'en est pas moins qu'une carte de plus dans le jeu géostratégique des grandes puissances et dans laquelle un pays comme la Mauritanie n'est qu'un minuscule grain de sable, avec toute la faiblesse de ce dérisoire matériau, mais sans sa capacité d'enrayer l'engrenage. Ne dit-on pas que les ambitions des peuples ne doivent pas dépasser leurs capacités réelles ? Et pourtant, c'est aussi valable en diplomatie. Et au delà, avons-nous la vision qu'il faut et surtout les hommes (ou femmes) en mesure de traduire tout cela sur le terrain à travers de véritables actes qui portent notre marque ? !
Source: l'authentique
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