Maintien de Ould Nagi et de Ould Oumarou en prison Une justice à deux vitesses



Maintien de Ould Nagi et de Ould Oumarou en prison Une justice à deux vitesses
La question qui se pose aujourd'hui et à laquelle il faudrait bien répondre un jour est celle de situer les responsabilités dans cette affaire. Fallait-il passer par l'ancien Gouverneur de la BCM et son adjoint pour atteindre les hommes d'affaires arrêtés un temps et libérés, après l'intervention d'un homme de Dieu auquel on pourrait reprocher de n'avoir pas " traité " l'affaire dans sa globalité ?

De quoi les deux hommes sont-ils responsables ? D'avoir décaissé les montants que les hommes d'affaires s'engagent à rembourser aujourd'hui ? D'avoir puiser eux-mêmes dans les coffres de la banque ? Ou bien n'ont-ils fait qu'obéir à des ordres venus de très haut ?

Il est évident que seul un procès en bonne et due forme permettra de lever tous les coins du voile qui entoure encore cette affaire qui, on le sait, ne finit pas avec le règlement à l'amiable du différend avec les banquiers. S'il faut que Ould Nagi et Ould Oumarou soient coupables de quelque chose, cela ne peut sortir du cadre de la responsabilité d'avoir signé l'ordre de transfert des fonds ou du profit qu'ils peuvent avoir tiré eux-mêmes de cette opération. Dans un cas comme dans l'autre, on expliquerait difficilement leur maintien en dehors du " deal " qui a été convenu entre la BCM et les trois hommes d'affaires. Ne peuvent-ils pas rembourser les montants qu'on leur réclame - si vraiment ils sont redevables de quelque chose - ou doivent- ils seulement servir de " justification " à une affaire qu'on a décidé de régler à l'amiable, après avoir réussi à faire revenir quelques milliards d'ouguiyas dans les caisses d'un Trésor public qui en a grand besoin ?


Mauvaise publicité


On ne peut dire que le tintamarre fait autour de l'affaire dite de la BCM a servi les desseins du président Mohamed Ould Abdel Aziz, si, comme on le prétend, on voulait inscrire cette histoire de gros sous dans le cadre de la lutte contre la gabegie. La force de frappe médiatique dont a fait preuve l'opposition, et surtout les proches et sympathisants des trois hommes d'affaires, a " fait brillé le soleil " sur les carences en communication du camp du pouvoir. Tout le monde est finalement sorti avec l'impression qu'il ne s'agissait, ni plus ni moins, que d'un règlement de comptes, comme savent le faire si bien les pouvoirs en Afrique. Près de chez nous, l'on dit que le président Wade en a usé et abusé pour écarter Idrissa Seck - revenu en grâce depuis - et Macky Sall, tous deux anciens Premiers ministres qui se sont mis au travers de la politique du Vieux.

Le pire pour le " président des pauvres ", c'est que la mauvaise publicité continue encore avec ce que d'aucuns considèrent comme des atteintes au principe sacro-saint de séparation des pouvoirs et même aux droits humains.

On ne saurait oublier la réponse apportée par le Collectif de défense des trois hommes d'affaires à la conférence de presse du ministre des Finances et du Gouverneur de la BCM, annoncée et transmise par la télévision nationale, le jeudi 24 décembre 2009, dans laquelle les avocats démontent toutes les arguties du gouvernement allant dans le sens d'une soi-disant lutte contre la gabegie.

Les erreurs du pouvoir sont tournées et retournées dans tous les côtés : avoir prononcé sur les ondes de la télévision la sentence définitive en désignant comme criminels de simples prévenus bénéficiant normalement de la présomption d'innocence consacrée par l'article 13 de la Constitution ("Toute personne est présumée innocente jusqu'à l'établissement de sa culpabilité par une juridiction régulièrement constituée"). Mais ça c'est - déjà - de l'histoire ancienne ! Ce qui doit préoccuper maintenant le président Mohamed Ould Abdel Aziz tient dans la suite de l'affaire : Pourquoi Ould Nagi et Ould Oumarou continuent à croupir en prison pour une affaire censée être réglée ? Une question qui en appellera sans doute une autre : le cas d'Ahmed Ould Khattry, ancien Directeur national de l'Agence de Promotion des Caisses Populaires d'Epargne et de Crédit (Porocapec) et du journaliste Hanevy, maintenu en prison, on ne sait pourquoi, après avoir purgé une peine de six mois.

On donne ainsi raison à la Fédération internationale des ligues des droits de l'Homme (FIDH) et l'Association mauritanienne des droits de l'Homme (AMDH) qui, lors de rencontres organisées les 7 et 8 avril 2009 avec les représentants du Conseil de l'Union européenne et de la Commission européenne, avaient fait part de leurs préoccupations sur la situation des droits de l'Homme en Mauritanie profondément marquée par le coup d'Etat du 6 août 2009 et dont le contexte politique actuel n'est, apparemment, que le prolongement naturel.

Depuis le coup d'Etat survenu le 6 août 2008, les atteintes aux libertés fondamentales se sont en effet multipliées, de même que les actes de harcèlement à l'encontre de ceux qui les dénoncent. En amont de l'élection présidentielle prévue le 6 juin 2009, puis organisée finalement le 18 juillet 2009, avec la participation de l'opposition, ces appréhensions devaient, en principe, cesser avec le retour à la légalité constitutionnelle. Ould Abdel Aziz doit vraiment savoir maintenant que ce n'est plus le pouvoir qui constitue l'enjeu de sa présidence mais ce qu'il léguera à la postérité. Pour cela, il faut bien qu'il se rattrape, par plus de justice et de démocratie, pour que son mot malencontreux " l'histoire de Hanevy ne me concerne pas " (puisqu'il a été embastillé après son arrivée au pouvoir) ne soit pas inscrit dans l'Histoire, au même titre que le fameux mot de Nicolas Sarkozy, le mardi 25 octobre 2005, alors ministre de l'Intérieur de Chirac, qui s'exprimait à Argenteuil (Val-d'Oise) : " Vous en avez assez de cette " bande de racailles " ? Eh bien on va vous en débarrasser ! " Cette petite phrase restera comme l'une de celles qui ont soulevé une vive polémique en France. Et il n'est sûr que les écarts de langage de notre président, assimilable par certains à son franc-parler, ne continuent à en faire de même. A quoi servent les conseillers, mon Dieu ?


Source: L'authentique

Jeudi 14 Janvier 2010
Boolumbal Boolumbal
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