Les lois sur la nationalité engendrent des conflits (essayiste).



Les lois sur la nationalité engendrent des conflits (essayiste).
En Afrique, les lois encadrant la nationalité ont parfois servi à contrôler le pouvoir économique et politique, engendrant ainsi des conflits, indique l’essayiste Bronwen Manby dans un ouvrage paru en avril dernier.

‘’Les lois sur la nationalité ont été utilisées comme outil de pouvoir économique et politique pour le contrôle de la terre, l’exploitation de marchés commerciaux ou l’accès aux fonctions publiques’’, écrit Manby dans ‘’La nationalité en Afrique’’, un ouvrage édité par Karthala et Open Society Foundations.

‘’Les enjeux des guerres civiles au Congo et en Côte d’Ivoire, le conflit inter-Etats […] qui oppose l’Erythrée et l’Ethiopie, la discrimination contre les Européens, les Libanais ou les Asiatiques au Zimbabwe, en Sierra Leone et en Ouganda’’ sont, selon elle, les conséquences de ‘’la définition juridique de la citoyenneté’’ dans ces pays-là.



En Côte d’Ivoire et en République démocratique du Congo (RDC) ‘’tout particulièrement, la discrimination en matière de nationalité a directement entraîné un conflit sanglant’’, note Manby.

Elle étudie la loi sur la nationalité dans plusieurs pays dont le Zimbabwe, avec le conflit foncier entre le pouvoir et les fermiers blancs, au début des années 2000. Selon elle, le refus du droit à la nationalité ‘’présente souvent des avantages pour les gouvernements, les personnes sans nationalité ne bénéficiant pas des protections et des services que l’Etat serait sinon tenu de leur accorder’’.

En Côte d’Ivoire et en RDC par exemple, la période postindépendance ‘’illustre combien la fixation sur l’authenticité et l’origine en matière de citoyenneté peut avoir des conséquences négatives pour la paix et la sécurité’’. Dans ces deux pays comme d’autres, privés du droit à la nationalité, des groupes ethniques ou religieux se font déposséder de ‘’leurs droits de citoyens, notamment les droits de vote et de posséder des terres’’, analyse Manby.

‘’Les pays africains qui ont adopté une approche inclusive de la citoyenneté, en attribuant largement celle-ci aux personnes nées dans leur [territoire], ont été ceux qui ont connu les plus grandes périodes de paix depuis l’indépendance’’, signale-t-elle, citant l’exemple de la Tanzanie. Ce pays, selon elle, ‘’est l’un des rares à accorder la citoyenneté à toute personne née sur son territoire’’.

‘’De même, plusieurs pays francophones du Sahel ouest-africain ont des législations non discriminatoires et généreuses en matière de citoyenneté pour les personnes nées dans le [territoire]’’, fait-elle savoir.

Bronwen Manby, conseillère principale à l’Open Society Foundations, estime que le déni du droit à la nationalité est d’autant plus préoccupant que ‘’le droit international n’oblige pas les Etats à octroyer la nationalité, sauf dans des cas extrêmement limités’’. ‘’Beaucoup [de] pays africains ont parsemé leur droit d’éléments de discrimination raciale’’, comme en Sierra Leone où, selon Manby, ‘’seules les personnes d’origine noire peuvent avoir la nationalité d’origine’’.

C’est aussi le cas du Liberia où ‘’les personnes qui ne sont pas noires+ ne peuvent obtenir la nationalité, même par naturalisation’’. Manby, ancienne directrice-adjointe de Human Rights Watch chargée de l’Afrique, raconte dans son livre l’histoire de Tommy Elias qui, quoique né en Sierra Leone il y a plus de 60 ans et vivant dans la capitale de ce pays, ‘’n’a jamais pu obtenir la nationalité de son pays’’. Sur un autre registre, elle constate que dans certains pays africains existent ‘’encore des discriminations sur la base du genre dans l’octroi du droit à la nationalité aux enfants nés dans leur pays ou à l’étranger’’.

Parmi, ces pays figurent le Burundi, l’Ethiopie, la Guinée, le Kenya, le Liberia, la Libye, Madagascar, le Mali, la Mauritanie, le Sénégal, la Somalie, le Soudan, le Swaziland, le Togo, la Tunisie et le Zimbabwe. ‘’Le principal argument utilisé pour priver de la citoyenneté pleine et entière les migrants arrivés assez récemment sur le continent africain est qu’ils ne sont pas vraiment originaires du pays’’, observe-t-elle.

Elle rappelle que cela est arrivé en Mauritanie d’avril 1989 à 1990 et ‘’quelque 75.000 Mauritaniens noirs ayant pourtant la nationalité de ce pays’’ avaient été expulsés par les autorités.

ESF/AD


Source : APS (Sénégal

Jeudi 4 Août 2011
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