Après la grave crise qui a sévi en Côte d'Ivoire, c'est au tour du Burkina Faso de Blaise Compaoré de connaître l'agitation. Depuis jeudi, le chef de l'Etat de 60 ans fait face à une mutinerie au sein de sa propre garde militaire. Existe-t-il un effet domino dans la région? Antoine Glaser, fondateur de La Lettre du Continent, répond aux questions du JDD.fr.
La Côte d'Ivoire va-t-elle déstabiliser ses riverains? Cela semble être au moins le cas au Burkina Faso, son voisin du Nord-Est et l'un des pays les plus pauvres du monde. Jeudi soir, des dizaines de soldats sont sortis dans les rues et ont pillé plusieurs commerces. Le domicile du chef d'état-major du président Blaise Compaoré a été incendié. La protestation s'est étendue vendredi matin à trois autres casernes. Les mutins du régiment présidentiel réclameraient des primes de logement qui ne leur ont pas été versée. Par mesure de sécurité, le leader burkinabé de 60 ans avait temporairement quitté la capitale pour Ziniaré, sa ville natale. Avec les contestations de la jeunesse fin février (qui avaient fait une victime), de l'ensemble de la population il y a une semaine et aujourd'hui les militaires, le Burkina Faso est plongé dans l'une des plus graves crises de l'ère Compaoré. Antoine Glaser décrypte la situation.
Il est encore difficile de connaître l'ampleur de la crise au Burkina Faso, mais était-elle latente?
La contestation n'est pas nouvelle. Le président a des difficultés avec son armée au moins depuis 2006. Juste avant le sommet franco-africain de février 2007, Blaise Compaoré avait d'ailleurs demandé l'aide de la DGSE pour analyser la situation à l'intérieur de son armée après des affrontements entre policiers et militaires, quelques mois plus tôt.
"Un retour de bâton face à la situation ivoirienne"
A quoi sont dus ces différents épisodes de violences dans son armée?
C'est une armée pléthorique à deux vitesses: il existe une garde républicaine largement favorisée et les soldats de bases régulièrement révoltés. Au sein de la première, la contestation s'effectue surtout entre le premier cercle du président Compaoré et des sous-officiers qui n'ont aucun commandement. Ce sont souvent des soldats peu scrupuleux. De nombreux policiers et douaniers ont largement bénéficié de la contrebande avec le nord de la Côte d'Ivoire. La situation actuelle au Burkina est d'ailleurs un retour de bâton face à la situation ivoirienne.
Il y a réellement un effet domino avec la Côte d'Ivoire?
Paradoxalement, oui. Avec l'accession au pouvoir d'Alassane Ouattara, on aurait pu penser que le Burkina de Compaoré, un de ses fidèles soutiens, se porterait mieux. Mais sur le long terme, c'est le contraire. Si le pays est repris en main par Ouattara, cela signifie que tout le business dans le nord de la Côte d'Ivoire qui se faisait avec le Burkina Faso ne va pas durer. Clairement, en Afrique, le risque est fort pour que ce genre de revendications salariales puisse toucher l'ensemble de la population, avec la possibilité d'être récupéré par l'opposition.
"Une main de fer dans un gant de velours"
Quel type de président est Blaise Compaoré, notamment au niveau de la scène africaine?
Il agit plus comme un patron des services secrets que comme un président. C'est un homme de l'ombre qui traite ses dossiers dans le plus grand secret. Il a toujours été impliqué dans les conflits de la région, du Libéria de Charles Taylor au conflit ivoirien en passant par le Togo et la Mauritanie. Et c'est une main de fer dans un gant de velours.
Est-ce qu'il est sur la sellette ?
A vrai dire, je ne peux pas vous répondre, il est encore trop tôt pour le dire.
Après la Côte d'Ivoire et le Burkina, les contestations peuvent concerner d'autres pays?
Je crois que l'Afrique a une profonde aspiration au changement. L'Afrique Sub-Saharienne suivra probablement l'Afrique du Nord. Même les dirigeants européens commencent à s'en rendre compte. C'est la fin d'une période. Les crises peuvent se généraliser à l'ensemble des pays avec des dirigeants au pouvoir depuis plus de vingt ans: le Sénégal, le Congo Brazzaville ou le Cameroun par exemple. Ces chefs d'Etats n'ont plus vraiment de perspectives
La Côte d'Ivoire va-t-elle déstabiliser ses riverains? Cela semble être au moins le cas au Burkina Faso, son voisin du Nord-Est et l'un des pays les plus pauvres du monde. Jeudi soir, des dizaines de soldats sont sortis dans les rues et ont pillé plusieurs commerces. Le domicile du chef d'état-major du président Blaise Compaoré a été incendié. La protestation s'est étendue vendredi matin à trois autres casernes. Les mutins du régiment présidentiel réclameraient des primes de logement qui ne leur ont pas été versée. Par mesure de sécurité, le leader burkinabé de 60 ans avait temporairement quitté la capitale pour Ziniaré, sa ville natale. Avec les contestations de la jeunesse fin février (qui avaient fait une victime), de l'ensemble de la population il y a une semaine et aujourd'hui les militaires, le Burkina Faso est plongé dans l'une des plus graves crises de l'ère Compaoré. Antoine Glaser décrypte la situation.
Il est encore difficile de connaître l'ampleur de la crise au Burkina Faso, mais était-elle latente?
La contestation n'est pas nouvelle. Le président a des difficultés avec son armée au moins depuis 2006. Juste avant le sommet franco-africain de février 2007, Blaise Compaoré avait d'ailleurs demandé l'aide de la DGSE pour analyser la situation à l'intérieur de son armée après des affrontements entre policiers et militaires, quelques mois plus tôt.
"Un retour de bâton face à la situation ivoirienne"
A quoi sont dus ces différents épisodes de violences dans son armée?
C'est une armée pléthorique à deux vitesses: il existe une garde républicaine largement favorisée et les soldats de bases régulièrement révoltés. Au sein de la première, la contestation s'effectue surtout entre le premier cercle du président Compaoré et des sous-officiers qui n'ont aucun commandement. Ce sont souvent des soldats peu scrupuleux. De nombreux policiers et douaniers ont largement bénéficié de la contrebande avec le nord de la Côte d'Ivoire. La situation actuelle au Burkina est d'ailleurs un retour de bâton face à la situation ivoirienne.
Il y a réellement un effet domino avec la Côte d'Ivoire?
Paradoxalement, oui. Avec l'accession au pouvoir d'Alassane Ouattara, on aurait pu penser que le Burkina de Compaoré, un de ses fidèles soutiens, se porterait mieux. Mais sur le long terme, c'est le contraire. Si le pays est repris en main par Ouattara, cela signifie que tout le business dans le nord de la Côte d'Ivoire qui se faisait avec le Burkina Faso ne va pas durer. Clairement, en Afrique, le risque est fort pour que ce genre de revendications salariales puisse toucher l'ensemble de la population, avec la possibilité d'être récupéré par l'opposition.
"Une main de fer dans un gant de velours"
Quel type de président est Blaise Compaoré, notamment au niveau de la scène africaine?
Il agit plus comme un patron des services secrets que comme un président. C'est un homme de l'ombre qui traite ses dossiers dans le plus grand secret. Il a toujours été impliqué dans les conflits de la région, du Libéria de Charles Taylor au conflit ivoirien en passant par le Togo et la Mauritanie. Et c'est une main de fer dans un gant de velours.
Est-ce qu'il est sur la sellette ?
A vrai dire, je ne peux pas vous répondre, il est encore trop tôt pour le dire.
Après la Côte d'Ivoire et le Burkina, les contestations peuvent concerner d'autres pays?
Je crois que l'Afrique a une profonde aspiration au changement. L'Afrique Sub-Saharienne suivra probablement l'Afrique du Nord. Même les dirigeants européens commencent à s'en rendre compte. C'est la fin d'une période. Les crises peuvent se généraliser à l'ensemble des pays avec des dirigeants au pouvoir depuis plus de vingt ans: le Sénégal, le Congo Brazzaville ou le Cameroun par exemple. Ces chefs d'Etats n'ont plus vraiment de perspectives
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