Gouvernance : Risques mesurés ou histoire de se faire hara-kiri ?



Gouvernance : Risques mesurés ou histoire de se faire hara-kiri ?
Les Mauritaniens, toutes catégories confondues, vivent aujourd'hui au rythme de la " guerre " que le président Mohamed Ould Abdel Aziz mènent contre les " mouficidines ", ces " gabégistes " qui, trois décennies durant, ont mis le pays à sac.

Certains apprécient, d'autres dénoncent le caractère sélectif très prononcé de cette chasse aux sorcières. Pour les premiers, ce qui compte, c'est de faire renflouer les caisses de l'Etat avec les remboursements de montants faramineux détournés de leurs objectifs initiaux. Pour les seconds, il ne faut surtout pas que la volonté de faire la différence avec ses prédécesseurs pousse le " président des pauvres " à verser dans un excès de zèle qui peut porter un coup fatal à la renommée du pays, en enfreignant, d'une manière ou d'une autre, l'orthodoxie économique qui fonde les rapports entre l'Etat et ses partenaires privés. Toujours est-il que la " guerre " qu'Aziz mène contre les détourneurs des deniers publics commence à porter ses fruits. Personne ne se sent plus à l'abri et personne n'ose plus prendre ce qui ne semble plus être un bon risque : puiser dans les caisses de l'Etat ! Une atmosphère de méfiance qui rappelle à certains les dures années du régime de Mohamed Khouna Ould Haidalla où chacun était sur ses gardes. La série noire des " limogés " constitue sans nul doute une dissuasion pour tous ceux qui ont la tentation de faire comme avant. Une sorte de psychose qui s'installe dans les rangs de l'administration. Question : jusqu'à quand peut durer le manège ? Le président Aziz dit vouloir moraliser la vie publique. Noble objectif mais qui demande plus qu'une simple " rafle " d'anciens hauts responsables qui, comme tous ceux qui ont servi sous l'ère Taya, sont responsables de quelque chose ! On mettrait plus qu'un mandat de cinq ans pour rendre gorge à des dizaines de milliers de " moufcides " dont certains sont encore en service. Il ne s'agit pas non plus " d'amuser les foules ", souligne un compatriote, haut cadre international, qui suit de très près ce qui se passe au pays et ne croit pas, apparemment, à la stratégie du pouvoir : donner l'impression que les choses bougent, ne serait-ce que du point de vue économique.

Un sentiment que ne partage pas la classe des salariés de la Fonction publique qui ont déchanté à deux fois, en n'entendant pas le président de la République prononcer une augmentation, à l'occasion de la fête de Tabaski ou de l'indépendance. Dans ce domaine précis, l'ancien président Ely Ould Mohamed Vall a un avantage comparatif sur Ould Abdel Aziz, lui qui a gratifié les travailleurs d'une augmentation de 100% ! Aziz privilégie d'abord de ramener les clignotants au vert. Les dépenses de l'Etat doivent être revues et corrigées…à la baisse. La facture salée des logements conventionnées, les prises en charge de l'eau et de l'électricité ainsi que l'anarchie qui règne au sein de la gestion du parce automobile de l'Etat sont des préalables pour rationnaliser les ressources du pays et envisager ensuite toute autre redistribution. Pour le moment, le président n'a d'égards que pour les pauvres. Les visites qu'il effectue de manière impromptue sont de nature à les rassurer qu'il veille au grain. Les responsables (ministres, walis, hakem, directeurs) sont sur le grill depuis que le président Aziz a inauguré ces descentes qui commencent à faire mouche.


Morosité ambiante dans le domaine politique



Dans le domaine politique, le président Aziz a des idées arrêtées : l'opposition doit rester l'opposition. A ceux qui prônent l'ouverture aux partis d'opposition pour apaiser une scène politique encore fumante, après une élection présidentielle contestée par les principaux adversaires d'Ould Abdel Aziz, ce dernier oppose la volonté de mener des réformes en solo.

Une orientation qui ne semble tout de même pas s'appliquer au parti " Tawassoul " (islamistes) qui s'est allié à l'Union pour la République (UPR) lors du renouvellement du tiers du Sénat. Pas d'ouverture en vue donc, ni même d'apaisement puisque le président Aziz croit maîtriser la situation. Economiquement, la situation s'améliore. Les bailleurs de fonds acceptent de rouvrir les vannes, avec le risque cependant d'un réendettement qui, paradoxalement, s'inscrit en porte-à-faux avec la tendance aux désendettements remarquée dans la plupart des pays africains. Politiquement, la stratégie du pouvoir peut bien produire l'effet inverse de ce qui est escompté : pousser l'opposition à endurcir ses positions, du moment que le pouvoir ne comprend que ce langage. On ne serait pas étonné à voir revenir cette situation au moment où le pouvoir fait face à une nouvelle " expédition " terroriste avec le kidnapping de trois humanitaires espagnols. Un rude coup pour les autorités sécuritaires du pays qui, il y a quelques semaines, avaient fait un grand tapage sur ce que d'aucuns avaient qualifié de " sécurisation du désert " !

Le pouvoir aura du mal à convaincre que la lutte contre le terrorisme est entrée dans une phase nouvelle alors que les terroristes sévissent même sur un grand axe comme celui reliant la capitale politique à la capitale économique du pays !

C'est ce grand défi que le président Aziz doit gagner au plus vite. Sans quoi, les investisseurs que le gouvernement a eu de la peine à faire revenir risquent de rebrousser chemin.


Source: l'authentique

Vendredi 4 Décembre 2009
Boolumbal Boolumbal
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