Fatimata Ball, représentante des personnes vivant avec le VIH Sida en Mauritanie : Des milliers de sidéens non identifiés



Fatimata Ball, représentante des personnes vivant avec le VIH Sida en Mauritanie : Des milliers de sidéens non identifiés
La Mauritanie, à l’instar des autres pays de la communauté internationale a célébré le mardi 01 décembre 2009, la journée mondiale de lutte contre le Sida. A cette occasion, le Secrétariat Nationale de Lutte contre le Sida a organisé au terrain des anciens blocs de Nouakchott, une caravane de l’espoir sous le thème « les personnes vivants avec le VIH Sida, leur droit, notre priorité.
Sur place, nous avons rencontré Mme Fatimata Ball, représentante des personnes vivant avec le VIH Sida en Mauritanie qui nous parle de cette journée et de leur lutte pour survivre davantage.




QN : quel est l’objectif exact de cette journée du 1er décembre ?

Fatimata Ball :D’abord faire comprendre à la population mauritanienne qu’il y a le VIH Sida dans notre pays, parler de son existence , sensibiliser aussi sur les modes de transmission et de prévention et surtout permettre aux personnes atteintes du virus qui ont décidées de sortir de l’ombre, de s’afficher et de parler avec leurs compatriotes, de les sensibiliser sur leur sort et de parler de leurs droits, de leur faire comprendre qu’ils sont des êtres humains et que leurs droits sont souvent bafoués par la famille et la société en général et que cela n’a pas lieu d’être, mais qu’ils doivent être respectés car ils sont atteints d’une maladie incurable qui est heureusement prise en charge gratuitement dans notre pays. Une maladie contre laquelle on peut lutter.

Quel sera le programme de la journée ?
Pour le programme de la journée, nous avons quatre ONG qui seront présentes : l’ONG Amami, Santé Sans Frontière qui va faire des sensibilisations avec dépistages, SOS Pair Educateur et ONG RAPMA. Le leader religieux Baba Ould Mata va sensibiliser la population sur les droits des personnes vivant avec le VIH, leur relation avec la population et surtout leur place dans la société. En plus de cela il y a trois tentes qui ont été dressées par le Secrétaire Exécutif, une qui va parler des activités du Secrétaire Exécutif et les deux autres vont être occupées par des personnes vivant avec le VIH qui sont venues pour expliquer leur vécu quotidien à la population.

Des partenaires ou bailleurs de fonds ?

Il y a seulement l’ONU Sida qui nous a appuyés dans cette journée.

Quel est le nombre de personnes atteintes par le VIH en Mauritanie ?

Nous avons seulement le chiffre officiel de ceux qui sont traités. Il y a 2700 personnes qui sont suivies au niveau de l’Hôpital Sabah. A l’intérieur aussi, nous avons trois types de prises en charge à Kaédi, Kiffa et à Nouadhibou. Ce chiffre ne reflète pas la réalité qui est un taux de séroprévalence de -1%. Ce qui veut dire que nous avons entre 15000 et 30000 personnes vivant avec le VIH Sida dans notre pays. La question qu’on se pose aujourd’hui est : où sont ces personnes ? Sont-elles dans la nature, sont-elles mal informées où ont-elles peur de se montrer ? Il est de notre devoir, nous les personnes vivant avec le VIH de parler, de tirer la sonnette d’alarme pour que la population comprenne et réagisse pour que ces personnes infectées puissent sortir de l’ombre. Et aussi de permettre au peuple mauritanien de comprendre que chacun à son rôle à jouer. Pour cela, il faut aller se faire dépister, accompagner les malades, ne pas les rejeter, respecter leur droit et enfin faciliter leur accès au traitement ; voilà les conditions qui feront que les 30000 malades qui sont dans la nature auront le courage de sortir de l’ombre et de se laisser prendre en charge.


Actuellement, quel est son degré de sensibilisation en Mauritanie ?
Le VIH sida est un problème dont on doit parler tous les jours et à tous les niveaux. D’abord au niveau de la famille, il faut en parler avec les enfants, les faire comprendre qu’il y a une maladie mortelle qui existe et leur dire, comment elle se transmet. Parce que la prévention est très importante surtout chez les jeunes pour qu’ils puissent connaître l’impact négatif de la maladie sur le développement d’un pays pour qu’ils reconnaissent l’enjeu qui est en cours. Et aussi en parler dans le milieu du travail parce qu’il y a des malades qui se sentent mal, car ils sont rejetés. Il faut aussi en parler dans les milieux hospitaliers, dans les dispensaires, dans les marchés, dans les boutiques, car c’est un sujet extrêmement grave auquel on n’a pas encore donné sa dimension réelle alors que le VIH n’attend pas, il continue sa route. Malheureusement nous aussi, nous continuons de la même façon en parlant du VIH très rarement dans l’année. D’ici une année ou deux, on va se retrouver avec un taux de séroprévalence qui va aller de 5 à 10%. Il y a eu des pays qui ont connu l’expérience, comme l’Ouganda qui est passé jusqu’à 30% parce qu’ils n’ont pas voulu en parler ouvertement et ce serait malheureux en Mauritanie qu’on ne prenne pas exemple sur les autres pays qui sont passés avant nous et qui ont eu une expérience malheureuse dans ce domaine. Il y a aussi des leaders religieux qui sont présents et qui sont bien engagés et qui devraient faire plus dans leur prêche dans les mosquées parce qu’ils sont très bien écoutés. Il y a aussi une volonté politique sans précédent dans notre pays qu’il faut louer et nous demandons au Président de la République de ne pas oublier les engagements qu’il a pris. Nous savons qu’il ne va pas nous oublier, mais nous demandons qu’il redouble encore d’effort.

Quels genres d’engagements ?
Il a pris des engagements forts concernant notre prise en charge. Quoi qu’il arrive avec ou sans bailleur l’Etat mauritanien s’engage à nous soigner, l’Etat mauritanien s’engage à nous accompagner, à maintenir en place le Programme National de lutte contre le VIH Sida et nous demandons au Président de ne pas oublier nos doléances qui sont l’ancrage du Programme National au niveau de la Présidence. Parce que nous savons que seul le Président Aziz peut mobiliser la population derrière lui, nous voulons qu’il soit le président du Comité national pour refléter l’engagement de son gouvernement.
Nous voudrons aussi une ligne budgétaire pour que l’on se sente plus en sécurité. Le fait d’avoir cette promesse nous rassure, mais il faudrait avoir une ligne budgétaire pour nous réconforter. Parce que quand il y a des bailleurs nous continuons notre travail et quand il n y a plus de bailleurs, on nous fait traîner.

Où en êtes-vous avec la Banque mondiale ?

Juste après notre sit-in devant la Banque Mondiale, nous avons été reçus par le Représentant résident qui a organisé une vidéoconférence avec Washington. Nous avons discuté avec eux de tous nos problèmes. Nous avons compris qu’ils étaient très sensibles à cela, nous leur avons aussi fait comprendre que nous n’étions pas là pour dire que nous sommes mécontent d’eux, mais pour leur dire qu’ils ont joué rôle dans notre vie et que nous tenons à eux pour appuyer notre gouvernement à prendre notre prise en charge globale. Ils ont compris cela, ils nous ont fait des promesses. Promesses qui ont été suivies d’une réponse officielle envoyé par le président de la Banque Mondiale aux deux représentants vivant avec le VIH, dont je suis l’une, des promesses dans lesquelles, il s’engage à accompagner notre gouvernement dans tous ce qui est financement pour le Programme National de lutte contre le VIH Sida.

Donc, on peut dire que vous avez eu gain de cause ?
Nous sommes satisfaites, car nous savons qu’ils vont revenir. Ils l’ont promis dans leur lettre. Le Fonds Mondial aussi va revenir, car le gouvernement mauritanien a satisfait toutes leurs doléances. Nous pensons bientôt qu’ils seront là tous les deux, mais surtout nous sommes rassurés de voir que le gouvernement nous a promis avec ou sans retour des bailleurs qu’il ne nous laissera pas tomber.

Un message aux autorités ?
Nous profitons de cette interview pour demander au président de la république de nous recevoir, nous les représentants pour reparler de cette lettre et de son engagement et de l’engagement de son gouvernement, de nos espoirs et désespoirs du passé pour que çà ne se reproduise plus.

Propos recueillis par Dialtabé



Samedi 5 Décembre 2009
Boolumbal Boolumbal
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