Crise mauritanienne : Dans l’antichambre des négociations de Dakar



Crise mauritanienne : Dans l’antichambre des négociations de Dakar

A l’antichambre de la salle de négociation, attendent des Mauritaniens anonymes. Parmi eux, Sidi, 2 ans - né dans la période de transition démocratique - qui, dans ses joyeuses et insoucieuses gambades sur le tapis rouge d’un grand hôtel dakarois, suivait avec innocence, le jeu de la diplomatie.

Convient-il, dans les angoisses présentes du peuple mauritanien, de parler de la joie d’un enfant gambadant dans les murs du Méridien Président, hôtel grand standing de Dakar sur la pointe des Almadies ? Peut-être pas ! Est-ce par ailleurs un péché ? Si c’en est un, ce serait alors un péché véniel. En tout cas, Sidi (2 ans, né le 19 mars 2007 dans l’entre-deux tours de la Présidentielle qui a vu l’arrivée de Sidi Ould Cheikh Abdallahi au pouvoir) amusait son père, neurochirurgien dans un hôpital de la capitale sénégalaise. Diplômé de Paris, Kleib, collaborateur « à distance » d’un journal de Nouakchott à ses heures perdues, donnait à voir autour de lui, les moindres gestes de son fils. Ce personnage austère et au verbe avenant, bon locuteur de la langue française, guettait dans l’antichambre de la salle de négociations, les moindres informations. Ainsi se plaisait-il à se donner à la passion de son Violon d’Ingres.

C’est avec joie qu’il apprît au demeurant, du frère cadet de Sid’Ahmed Ould Raiss, directeur de campagne du Général Ould Abdel Aziz, que les dates du 21 juillet et du 4 août 2009 ont été retenues pour le premier et le second tour de la prochaine élection présidentielle. Et que les parties prenantes à la médiation internationale offerte par le président Abdoulaye Wade théorisent la formation d’un gouvernement d’union nationale avec un Premier ministre indépendant. Indépendant ? Kleib doute de l’opportunité d’user de ce terme qui n’a, à ses yeux, la résonance sémantique qu’on est en droit d’attendre. A l’en croire, en Mauritanie, on n’est jamais à l’abri des clivages tribaux (sic). « C’est un cercle vicieux », fait-il observer en biaisant du regard le petit Sidi qu’il appelait « la mascotte des négociations », dont la course s’arrêtait aux pieds d’Abasse. L’étudiant en 4ème année de Médecine de l’université Cheikh Anta Diop aidait l’enfant à se relever et le prît par la main. Il allait dans la cadence de « bébé ». Kleb voyait déjà en cette complicité « de circonstance » les aspirations de la jeunesse au changement en Mauritanie.

Le changement, tous dans les coulisses l’appellent de tout leur vœu : Mohamédou Ould Cheikh est contrôleur aérien résidant à Dakar, il a les oreilles point fermées aux négociations. Pourtant, il dit se réclamer d’aucun parti. Ahmed Béchir, lui aussi venu de Nouakchott, dit se soucier du dénouement heureux de la crise politique dans son pays. Mohamed Salem est gérant d’un hôtel à Saint-Louis, ville passerelle vers la frontière terrestre sénégalo-mauritanienne. Membre d’aucune chapelle politique, son « seul » parti, fait-il savoir, c’est la Mauritanie. Marié à une Sénégalaise, il se réjouit que le Président Wade offre sa médiation aux frères et sœurs de l’autre rive du fleuve Sénégal.

Le jeune Sidi, que le papa donne pour « la seule personne honnête et innocente en Mauritanie », voit comment, sous ses rires innocents et mots inaudibles mais inintelligibles, se décide son avenir. Il en rit.

Sous la lumière pâle des réverbères « semés » dans les jardins de l’hôtel - dans un trou de verdure -, un groupe de journalistes venus de Nouakchott retrouvent leurs habitudes bédouines : du thé pour garder son mal en patience. « Ils sont allés se coucher (les parties en négociations, ndlr) et Gadio est parti », renseigne, la mort dans l’âme, un confrère mauritanien qui venait du hall. « Tant pis pour nous, nous allons rendre compte de notre joie de découvrir ce beau pays qu’est le Sénégal », lâche-t-il en accompagnant sa phrase d’un geste de dépit. Il est appuyé par son compatriote visiblement harassé par la longue attente : « Le Sénégal aura quand même essayé ».

Abdourahmane SY


Lundi 1 Juin 2009
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