Colonel Ould Mamy, ami de Aziz et passeur de la République



Colonel Ould Mamy, ami de Aziz et passeur de la République
Il est lundi 31 août 2009 au matin, à l’aéroport international de Nouakchott, peu avant le décollage du vol Mauritania Airways, en partance pour Las Palmas. Devant le salon d'honneur, le douanier A.K. (*) était loin de se douter qu'il est sur le point de déclencher un scandale impliquant son patron, le Colonel Dah Ould Mamy reconvertit, pour l'occasion, en passeur pour le compte du Directeur de Nosomaci SA, l'homme d'affaires Mohamed Salem Ould Dahi.

Tout a commencé lorsque le secrétaire particulier du Colonel Ould Mamy pénètre dans le salon d'honneur, porteur d’une valise à remettre à Ould Dahi, au pied de la passerelle, de telle sorte que le contenu échappe aux douanes.

Depuis quelques mois, les douaniers mauritaniens sont devenus très tatillons sur l'argent liquide qui quitte le pays. Obéissant à des consignes strictes du plus haut sommet de l'Etat, les agents sont obligés de saisir tout montant supérieur à 3.000 euros. Bien entendu, les porteurs d'un montant inferieur sont obligés de produire une autorisation.

La mesure est réputée contrer l'eternel fuite des capitaux, mais pas seulement. En effet, la plupart des hauts fonctionnaires du ministère des finances et de la Banque Centrale de Mauritanie (BCM) ont pris l'habitude de se faire débloquer des autorisations de change, qui leurs permettent d'obtenir un euro au taux de 370 ouguiyas.

Il ne leur reste, ensuite, qu'à se débrouiller pour quitter la Mauritanie avec le montant. Une fois à l'étranger, ils le remettent au représentant de n'importe quel commerçant mauritanien, contre la somme de 420 ouguiyas pour chaque euro, le total versé à Nouakchott.

La plus value obtenue permet, à ses fonctionnaires, de réaliser de bénéfices appréciables, et ce au moment où la BCM est incapable d'honorer les besoins du marché local en denrées de premières nécessité. A titre d'exemple, dimanche 30 août, les banques primaires ont demandés, à la BCM, de leurs fournir 47 millions de dollars pour que les importateurs puissent approvisionner le pays mais la BCM ne leurs a fourni que 380.000 USD. C'est tout ce qu'elle possède, prétendra-elle !

C'est dans ce contexte économique très délétère que l'homme d'affaires Ould Dahi demande, au Colonel Ould Mamy, directeur général des Douanes, de l'aider à sortir 5 millions d'euros du pays. Le Colonel charge, alors, son bras droit de prendre la valise pleine de billets, de la faire passer par le salon d'honneur et de la donner à Ould Dahi, en veillant à ce que ce dernier puisse regagner l’avion, sans encombres.

Mais arrivé au salon d'honneur, le douanier A.K. demande d'ouvrir la valise ; le chef du bureau de directeur appelle alors son patron et ce dernier lui demande de lui passer l’agent exigeant ; il recommande de ne toucher à rien, ensuite il monte dans sa voiture et roule, tombeau ouvert, vers l’aéroport.

Arrivé sur place, le directeur des douanes remonte les bretelles au douanier zélé, avant de récupérer la valise, toujours intacte, et de la remettre, lui-même, à Ould Dahi qui embarque immédiatement, juste avant le décollage.

Ahuri, le douanier A.K. raconte, à Taqadoumy comment, une semaine plus tôt, le même Colonel Ould Mami débarquait à l'aéroport, tout aussi énervé, pour donner une leçon sur la nécessaire protection des devises de la Mauritanie.

Le dimanche 23 août, les douaniers arrêtent A.O.S. (*), un voyageur qui s'apprêtait à embarquer à bord du vol vers Tunis ; il était en possession de 4.000 euros, donc en dépassement de son seuil autorisé de 3.000 mais, circonstance atténuante, il subissait une évacuation médicale ; de plus, il détenait tous les documents nécessaires : recommandation d'un médecin nouakchottois, rendez-vous avec un praticien tunisien, etc.

Les douaniers hésitaient sur la conduite à tenir. Certains préconisaient la saisie des mille euros de trop, d'autres, au contraire, de se contenter d'un avertissement oral et de laisser le malade aller se faire soigner.

Mais au milieu des conciliables, le Colonel Ould Mamy débarque dans la salle et, dès qu'il prend connaissance du dossier demande, séance tenante, de saisir la totalité du montant, avant de transmettre l’affaire au Procureur de la République, à charge, pour ce dernier, d'entamer des poursuites.

Et le directeur des Douanes de se lancer dans un long monologue, devant les douaniers et les voyageurs ébaubis : "aucune ouguiyas de l'argent de la Mauritanie ne sortira sans autorisation, fini le laxisme, dorénavant la loi s'appliquera à tous, avec rigueur et sévérité". Puis, s'adressant aux douaniers : "les consignes du Président sont claires, aucune indulgence envers les contrevenants, il s'agit de l'intérêt suprême de la Nation, la loi est claire, alors appliquez-là et faites votre travail".

Ensuite, fier de son laïus, il quitte la salle, droit comme la justice.

Le Colonel Ould Mamy a longtemps été le bras droit de Ould Abdel Aziz au Bataillon pour la sécurité présidentielle (Basep), avant d’être nommé à la tête des Douanes, peu après le putsch du 6 août 2008, à la place du Colonel Mohamed Ould Mohamedou. Ce dernier, bien que parent de Ould Abdel Aziz, est soupçonné d'être favorable à son ennemi - et néanmoins cousin – le Colonel Ely Ould Mohamed Vall.

Selon nos informations, Ould Dahi a effectivement quitté le territoire avec ses 5 millions d’euros, alors que le malade s'est vu saisir ses 4.000 euros, avant de se faire trainer en justice.

Et pendant ce temps, le Président de la République Mohamed Ould Abdel Aziz, sans doute trop fatigué par le sommet de l'Union africaine et les manières envahissantes de Kadhafi, a décidé d'effectuer une visite privée au royaume d’Espagne, en compagnie de sa famille. Le séjour sera consacré à la villégiature et à la découverte des lieux touristique de l'Andalousie, ou alors à des balades au bord de la Méditerranées, les pieds dans l'eau.

Quant aux habitants de Rosso, ils ont toujours, eux aussi, les pieds dans l'eau.

Le Président des pauvres s’offre des vacances et après lui le déluge !


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* A.K. & A.O.S : Nous avons sciemment donné des fausses initiales, afin de protéger notre source.




Mercredi 2 Septembre 2009
Boolumbal Boolumbal
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