Le président de la République, Mohamed Ould Abdel Aziz, assure la présidence tournante du Conseil de Paix et de Sécurité de l’Union Africaine (CPS/UA), depuis le début de l’année, dans un contexte continental fortement marqué la crise ivoirienne et le déclenchement d’une guerre civile en Libye.
Fait inhabituel, Nouakchott a abrité, dans la foulée de cette désignation, une série de rencontres du panel de chefs d’Etat sur la Côte d’Ivoire et du comité ad-hoc sur la Libye, offrant, du coup, l’image d’une plaque tournante de la diplomatie continentale.
La tourmente électorale ivoirienne, vite transformée en une authentique tentative de détournement du suffrage universel et du pouvoir, par un président sortant battu dans les urnes, a connu son épilogue dans l’arrestation de Laurent Gbagbo, le 11 avril dernier. Quant au conflit libyen, il présente, aujourd’hui, tous les indices inquiétants de l’enlisement, en dépit de l’intervention aérienne de l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN), dont l’objectif, avoué, était de faciliter une victoire rapide, au Conseil National de Transition (CNT), vecteur de la révolte anti-Kadhafi. Un pourrissement face auquel le continent africain demeure impuissant, malgré un effort de reprise en main, à l’issue de deux rencontres au sommet sur la question, tenues, à Nouakchott, il y a quelques semaines.
Mais si l’action internationale de Mohamed Ould Abdel Aziz, à la tête de l’instance continentale de paix et de sécurité, donne, manifestement, un regain de poids à la diplomatie mauritanienne, confinée, de trop longues années, dans des seconds rôles, voire condamnée à une quasi-inexistence, elle reste ternie, notent les observateurs, par une contestation nationale récurrente, avec un front social et politique de plus en plus fortement agité.
Concertations tous azimuts
Parfaite illustration, avec l’intense activité du président de la République, la semaine dernière. Une «diplomatie du téléphone», très sollicité, avec les présidents tchadien, Idriss Deby Itno; ivoirien, Alassane Dramane Ouattara; sud-africain, Jacob Zuma; et malien, Amadou Toumani Touré (ATT). Des entretiens largement médiatisés, par les organes du gouvernement, qui sont restés, toutefois, dans l’habituelle langue de bois, se contentant d’annoncer que «les entretiens téléphoniques ont porté sur le renforcement des relations bilatérales», entre la Mauritanie et chacun des pays concernés. Interprétant cette activité diplomatique à leur manière, les détracteurs du pouvoir soutiennent, de leur côté, qu’elle vise à détourner l’opinion de la profonde déprime politique, économique et sociale que connaît le pays. Cela dit, les avis internes à notre pays expriment, surtout, les positions de ses chapelles politiques (majorité ou opposition). Quelle qu’en soit la pertinence, le renouveau diplomatique appartient à la catégorie des faits et mérite, donc, une certaine analyse.
Les chefs d’Etat récemment contactés sont, tous, concernés par les développements des crises ivoirienne et libyenne, tandis que se profile un grand évènement continental. Le président ivoirien, Alassane Ouattara, qui a prêté serment le 6 mai dernier, sera, en effet, investi, en grande pompe et en présence d’une foule de chefs d’Etat, le 21 mai prochain, à Yamoussoukro, la capitale politique de la Côte d’Ivoire, à 250 kilomètres au nord d’Abidjan. Mohamed Ould Abdel Aziz doit participer à cette grande messe politique. Dans son costume de président du CPS/UA, l’organe continental chargé de garantir la paix et la sécurité sur le continent, il devra accompagner le nouveau président ivoirien, dans sa démarche de réconciliation nationale.
A côté de l’impératif continental, il y a, également, une autre raison, de taille, liée à la dimension bilatérale des rapports entre Nouakchott et Abidjan. Car, au bord de la lagune ébrié, vit une importante communauté mauritanienne, surtout active dans le commerce de détail et la distribution.
Notre pays n’étant plus membre de la Communauté Economique Des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) depuis 1999 – une décision du régime Taya, véritable défi à l’histoire, la géographie, la religion et la culture – il faut, absolument, trouver de bonnes formules, au plan bilatéral, pour que nos opérateurs économiques échappent au paiement d’une forte taxe, conditionnant l’accès au précieux sésame que représente la carte de séjour. Une carte de séjour, pour les hors CEDEAO, introduite, en Côte d’ivoire, par un certain Alassane Ouattara, alors Premier ministre du défunt président, Félix Houphouët Boigny…
Météo mauritanienne: avis de grosse tempête
Mais, parallèlement à l’embellie de notre diplomatie continentale, la météo sociale interne affiche un avis de grosse tempête. En cette occurrence, la formule apparaît, même, comme un doux euphémisme. Plus que la simple annonce d’une potentialité, c’est le constat d’une réalité: l’agitation sociale est déjà là et bien là. En plus de manifestations, quotidiennes, devant la présidence de la République et autres symboles de l’Etat, les syndicats du personnel de la santé ont déclenché un arrêt de travail, depuis le 7 avril dernier, pour réclamer la généralisation de l’indemnité de risque. Le Syndicat National de l’Enseignement Secondaire (SNES) a observé un arrêt de travail, les 8, 9 et 10 mai, dans le but d’obtenir la satisfaction de diverses doléances, liées à l’amélioration des conditions de vie des enseignants.
Cette prégnante réalité pousse une frange, grandissante, de la majorité à élever, désormais, la voix, en interpellant le gouvernement, sommé de satisfaire les revendications légitimes des nombreuses couches de la population, et d’éviter tout recours à la répression. Langage inédit, illustré par le discours du vice-président de l’Assemblée nationale, El Arbi Ould Jiddeine, prononcé à l’occasion de l’ouverture de la première session ordinaire de l’année, le lundi 9 mai dernier. Le fort bouillonnement de la marmite sociale, déjà combiné à un climat politique pas toujours apaisé, du fait de l’absence d’un véritable dialogue national inclusif, s’augmente, maintenant, de multiples grincements, au sein de la majorité.
Un saisissant contraste, pour un régime issu d’un putsch, avant de passer par la case «retour à l’ordre constitutionnel», qui arrive à se faire accepter, de fort belle manière, par la communauté internationale, tout en affrontant une contestation intérieure grandissante, générée par des préoccupations domestiques…
Amadou Seck
Source: Calame
Fait inhabituel, Nouakchott a abrité, dans la foulée de cette désignation, une série de rencontres du panel de chefs d’Etat sur la Côte d’Ivoire et du comité ad-hoc sur la Libye, offrant, du coup, l’image d’une plaque tournante de la diplomatie continentale.
La tourmente électorale ivoirienne, vite transformée en une authentique tentative de détournement du suffrage universel et du pouvoir, par un président sortant battu dans les urnes, a connu son épilogue dans l’arrestation de Laurent Gbagbo, le 11 avril dernier. Quant au conflit libyen, il présente, aujourd’hui, tous les indices inquiétants de l’enlisement, en dépit de l’intervention aérienne de l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN), dont l’objectif, avoué, était de faciliter une victoire rapide, au Conseil National de Transition (CNT), vecteur de la révolte anti-Kadhafi. Un pourrissement face auquel le continent africain demeure impuissant, malgré un effort de reprise en main, à l’issue de deux rencontres au sommet sur la question, tenues, à Nouakchott, il y a quelques semaines.
Mais si l’action internationale de Mohamed Ould Abdel Aziz, à la tête de l’instance continentale de paix et de sécurité, donne, manifestement, un regain de poids à la diplomatie mauritanienne, confinée, de trop longues années, dans des seconds rôles, voire condamnée à une quasi-inexistence, elle reste ternie, notent les observateurs, par une contestation nationale récurrente, avec un front social et politique de plus en plus fortement agité.
Concertations tous azimuts
Parfaite illustration, avec l’intense activité du président de la République, la semaine dernière. Une «diplomatie du téléphone», très sollicité, avec les présidents tchadien, Idriss Deby Itno; ivoirien, Alassane Dramane Ouattara; sud-africain, Jacob Zuma; et malien, Amadou Toumani Touré (ATT). Des entretiens largement médiatisés, par les organes du gouvernement, qui sont restés, toutefois, dans l’habituelle langue de bois, se contentant d’annoncer que «les entretiens téléphoniques ont porté sur le renforcement des relations bilatérales», entre la Mauritanie et chacun des pays concernés. Interprétant cette activité diplomatique à leur manière, les détracteurs du pouvoir soutiennent, de leur côté, qu’elle vise à détourner l’opinion de la profonde déprime politique, économique et sociale que connaît le pays. Cela dit, les avis internes à notre pays expriment, surtout, les positions de ses chapelles politiques (majorité ou opposition). Quelle qu’en soit la pertinence, le renouveau diplomatique appartient à la catégorie des faits et mérite, donc, une certaine analyse.
Les chefs d’Etat récemment contactés sont, tous, concernés par les développements des crises ivoirienne et libyenne, tandis que se profile un grand évènement continental. Le président ivoirien, Alassane Ouattara, qui a prêté serment le 6 mai dernier, sera, en effet, investi, en grande pompe et en présence d’une foule de chefs d’Etat, le 21 mai prochain, à Yamoussoukro, la capitale politique de la Côte d’Ivoire, à 250 kilomètres au nord d’Abidjan. Mohamed Ould Abdel Aziz doit participer à cette grande messe politique. Dans son costume de président du CPS/UA, l’organe continental chargé de garantir la paix et la sécurité sur le continent, il devra accompagner le nouveau président ivoirien, dans sa démarche de réconciliation nationale.
A côté de l’impératif continental, il y a, également, une autre raison, de taille, liée à la dimension bilatérale des rapports entre Nouakchott et Abidjan. Car, au bord de la lagune ébrié, vit une importante communauté mauritanienne, surtout active dans le commerce de détail et la distribution.
Notre pays n’étant plus membre de la Communauté Economique Des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) depuis 1999 – une décision du régime Taya, véritable défi à l’histoire, la géographie, la religion et la culture – il faut, absolument, trouver de bonnes formules, au plan bilatéral, pour que nos opérateurs économiques échappent au paiement d’une forte taxe, conditionnant l’accès au précieux sésame que représente la carte de séjour. Une carte de séjour, pour les hors CEDEAO, introduite, en Côte d’ivoire, par un certain Alassane Ouattara, alors Premier ministre du défunt président, Félix Houphouët Boigny…
Météo mauritanienne: avis de grosse tempête
Mais, parallèlement à l’embellie de notre diplomatie continentale, la météo sociale interne affiche un avis de grosse tempête. En cette occurrence, la formule apparaît, même, comme un doux euphémisme. Plus que la simple annonce d’une potentialité, c’est le constat d’une réalité: l’agitation sociale est déjà là et bien là. En plus de manifestations, quotidiennes, devant la présidence de la République et autres symboles de l’Etat, les syndicats du personnel de la santé ont déclenché un arrêt de travail, depuis le 7 avril dernier, pour réclamer la généralisation de l’indemnité de risque. Le Syndicat National de l’Enseignement Secondaire (SNES) a observé un arrêt de travail, les 8, 9 et 10 mai, dans le but d’obtenir la satisfaction de diverses doléances, liées à l’amélioration des conditions de vie des enseignants.
Cette prégnante réalité pousse une frange, grandissante, de la majorité à élever, désormais, la voix, en interpellant le gouvernement, sommé de satisfaire les revendications légitimes des nombreuses couches de la population, et d’éviter tout recours à la répression. Langage inédit, illustré par le discours du vice-président de l’Assemblée nationale, El Arbi Ould Jiddeine, prononcé à l’occasion de l’ouverture de la première session ordinaire de l’année, le lundi 9 mai dernier. Le fort bouillonnement de la marmite sociale, déjà combiné à un climat politique pas toujours apaisé, du fait de l’absence d’un véritable dialogue national inclusif, s’augmente, maintenant, de multiples grincements, au sein de la majorité.
Un saisissant contraste, pour un régime issu d’un putsch, avant de passer par la case «retour à l’ordre constitutionnel», qui arrive à se faire accepter, de fort belle manière, par la communauté internationale, tout en affrontant une contestation intérieure grandissante, générée par des préoccupations domestiques…
Amadou Seck
Source: Calame
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