Taghi Ould Cheikhna, Expert Economiste et Financier, à propos de la table ronde de Bruxelles

" Un retard, minime soit –il, dans l’exécution d’une étape d’un projet pourrait se répercuter sur tout le projet"



Taghi Ould Cheikhna, Expert Economiste et Financier, à propos de la table ronde de Bruxelles
Taghi A la table ronde de Bruxelles, les bailleurs de fonds ont promis, selon le premier ministre, Moulaye Ould Mohamed Laghdaf, 03, 2 milliards de dollars à la Mauritanie. Comment ces engagements se réaliseront-ils ? La Mauritanie va-t-elle cette fois résoudre l’épineux problème de la capacité d’absorption ? Nous avons cherché les réponses avec Taghi Ould Cheikhna, Expert Economiste et Financier

A la table ronde de Bruxelles, les bailleurs de fonds se sont engagés en faveur de la Mauritanie à hauteur de 3, 2 milliards de dollar, selon le premier ministre. Ce sont des promesses. Comment ces engagements se réaliseront-ils concrètement ? Y-a-t-il des délais ?

La réalisation des engagements qui ont été pris dans le cadre de la table ronde de Bruxelles dépendra, entre autres, de concours de plusieurs facteurs, à savoir :

Le planning d’exécution des projets : Les projets présentés dans la cadre de la table ronde de Bruxelles ont été pour la plupart planifiés sur une période de cinq ans, ce qui pourrait nécessiter de la part de la Mauritanie de veiller au respect des délais prescris dans les fiches techniques desdits projets.

La capacité d’absorption de fonds : La capacité d’absorption des fonds dépendra du degré d’avancement des réalisations conformément aux chronogrammes prescrits dans les fiches techniques des projets. Généralement, les bailleurs procèdent à l’envoi de plusieurs missions de suivi et évaluation pendant la période d’exécution du projet et ce en vue de vérifier que les résultats escomptés des projets ont été réalisées conformément aux objectifs visés.

Dans le cas où ces promesses seront tenues, il se pose à la Mauritanie, ce problème dit de capacité d’absorption. C’est quoi cette capacité d’absorption ? Pourquoi elle constitue un problème pour la la Mauritanie ?

Ont entend par la capacité d’absorption des fonds relative à un projet donné, la possibilité de ce projet d’arriver à son terme tout en réalisant les résultats escomptés conformément aux objectifs visés dans les délais requis.


En Mauritanie, les projets qui ont été financés par le passé par les bailleurs de fonds souffraient d’un problème d’absorption de fonds. En effet, les bailleurs de fonds exigent souvent que la contrepartie nationale couvre la majeure partie du volet fonctionnement (Achat de fourniture de bureau, de consommables …..) du projet, tandis que le volet investissement est assuré par les bailleurs eux mêmes. Et comme la contre partie nationale représente souvent un pourcentage inférieur ou égal à 20% des montants globaux des projets, les managers ont plus tendance à mettre l’accent sur cette partie du financement qui est facilement mobilisable comparativement aux processus de décaissement des bailleurs qui sont souvent soumis à des procédures généralement lentes. Ceci pourrait avoir comme conséquence, un retard dans l’exécution des projets conformément aux chronogrammes prescrits dans les fiches techniques desdits projets.

La partie du financement supportée par les bailleurs de fonds et qui représente en général 80% de l’enveloppe globale du projet est soumise à des procédures de décaissement nécessitant souvent des appels d’offres transparents et qui respectent des délais incompressibles .Ce qui veut dire qu’un retard minime soit –il dans l’exécution d’une étape donnée d’un projet pourrait se répercuter sur tout le projet, ce qui va engendrer nécessairement la non exécution d’une partie du projet et en conséquence la non absorption de la totalité des fonds.

A cela s’ajoute le problème de choix de compétence pour l’exécution des projets nécessitant un savoir –faire particulier.

Au regard des financements promis à la Mauritanie à la table ronde de Bruxelles, quels sont les risques qui peuvent engendrer le retard d’exécution des projets dans les délais requis ?

La nature et le niveau des risques peuvent changer au cours du temps et avoir un impact sur le retour sur investissement exigé par les sponsors (promoteurs) du projet ; cependant, le gouvernement ne doit pas céder à la tentation d’offrir une structuration trop avantageuse du projet aux sponsors pour s’assurer de leur participation.

Une répartition de risque juste et équilibrée assure le succès d’un projet; généralement, le secteur privé est mieux placé pour assumer le risque commercial et les risques liés à la construction, l’exploitation et le financement du projet. Le gouvernement quant à lui assume les risques politiques et une partie des risques liés à la demande dans certains projets.

Les risques liés à la phase de construction ou d’exploitation peuvent dans des situations particulières avoir des conséquences négatives sur l’évolution du projet. On peut citer comme exemples : Le dépassement des délais et des budgets : Si le projet dépasse le délai et le budget prévus dans sa fiche technique, ceci pourrait représenter un risque pour la bailleur et le bénéficiaire à la fois.

Il y a aussi le risque de non absorption de fonds qui peut générer un rapatriement éventuel de fonds au bailleur, le manque d’équipements ou retard dans la livraison du matériel , le manque de compétences des entreprises sous-traitantes en charge de la construction et non respect du cahier des charges techniques, l’impact environnemental et social du projet (pollution, déplacements de populations, conditions d’hygiène et de santé publique, etc.), le risque de la demande très élevée surtout s’il s’agit de secteurs sans accords du type contrat à prix fixe ….

En fin, je tiens à féliciter tous les Mauritaniens à l’occasion des financements qui ont été obtenus à la table ronde de Bruxelles.


Propos recueillis par Khalilou Diagana


Source: Griffe au Quotidien

Dimanche 27 Juin 2010
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