Présidentielle en Mauritanie : les premières leçons de la campagne



Le compte à rebours a commencé. Plus d’un million et demi d’électeurs sont appelés aux urnes cette fin de semaine. La campagne qui s’achève demain s’est bien déroulée pour les 6 prétendants au palais de Nouakchott qui sont allés à la rencontre des populations de la Mauritanie profonde qui ont plébiscité en premier le candidat du VE KHB et le candidat abolitionniste Ould Abeid. Le candidat du changement Ould Maouloud et le candidat indépendant Ould Boubacar ont séduit la capitale Nouakchott et la capitale économique Nouadhibou tandis que le candidat de la majorité Ould Ghazouani est apparu comme une ombre derrière son mentor.

Ce scrutin est le dernier après les élections de septembre dernier où le chef de l’Etat sortant Ould Aziz ne briguera pas un troisième mandat. Il intervient après la large victoire de la majorité aux législatives municipales et régionales. Pendant deux semaines les six candidats retenus par le constitutionnel se sont livrés à une bataille électorale acharnée et inédite. Les leçons que cette campagne a livrées sont bonnes pour la démocratie sur la forme et sur le fond. Tous les candidats sont allés à la rencontre des populations de l’intérieur comme à Nouakchott avec les moyens de chacun seulement avec un net avantage du candidat du pouvoir qui disposait de tous les moyens de l’Etat dont le président a fait usage à bon escient. Cette campagne a permis d’éclaircir le paysage politique qui augure une recomposition de l’opposition quels que soient les résultats du scrutin. C’est la première leçon. Le candidat de la coalition VE KHB a surpris les observateurs par la constance la rigueur et l’adhésion populaire notamment des jeunes partout dans les régions. Une popularité identique du candidat abolitionniste Ould Abeid configurant ainsi la vallée comme un des principaux enjeux de cette élection. C’est le deuxième enseignement. Alors que le candidat du changement Ould Maouloud et le candidat Ould Boubacar ont plus séduit l’intelligentsia, les ouvriers, les fonctionnaires et la classe aisée de Nouakchott et de Nouadhibou, le candidat favori du pouvoir est resté l’ombre de son mentor sur un fond de programme déjà vu. L’opposition a montré un visage conquérant avec des promesses raisonnables sur le plan économique et social notamment sur l’emploi, les salaires et le partage des richesses avec une place importante pour la promotion de la femme et de la diversité. Et au plan politique une volonté de rétablissement d’un Etat de droit basé sur le respect des institutions de la citoyenneté et des libertés avec en toile de fond le règlement du passif humanitaire gage de l’unité nationale et de la cohésion sociale. Ce troisième enseignement ne va pas sans souligner l’émergence des réseaux sociaux qui ont relayé de près la campagne des candidats et fait connaître leur programme. Cependant les observateurs ont pointé du doigt la dérive raciste de certains sites arabes qui ont censuré la campagne de KHB. L’autre dérive relève du sommet de l’Etat. Ould Aziz a fait la campagne à la place de Ould Ghazouani par procuration en ouvrant et en clôturant la campagne par une conférence de presse au point que les mauritaniens ont l’impression d’avoir deux candidats de la majorité. C’est le quatrième enseignement qui interroge par ricochet l’enjeu principal du scrutin du 22 juin prochain, la transparence. Avec l’absence d’observateurs étrangers et une CENI unilatérale, les candidats craignent une alternance volée.


Source: Yaya Cherif Kane

Dimanche 23 Juin 2019
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