Nouakchott / Bamako : Nuages dans le ciel



Nouakchott / Bamako : Nuages dans le ciel
Suite à la condamnation par la justice malienne à de légères peines de prison, 9 mois, de quatre membres d’un groupe, reconnus coupables de « port illégal d’armes », la Mauritanie ne décolère pas contre son voisin de l’Est, et en principe son allié dans le vaste combat contre le terrorisme islamiste.
Les raisons de cette colère, à l’origine d’un véritable orage dans le ciel, traditionnellement serein, des rapports entre Nouakchott et Bamako, sont liées à une demande d’extradition formulée par la Mauritanie auprès des autorités maliennes, restée infructueuse.
En effet, parmi les personnes ayant retrouvé la liberté dans la nuit du dimanche 21 au lundi 22 février 2010, après 9 mois de détention préventive, couvrant entièrement la peine infligée par la décision du tribunal de Bamako, figure un citoyen mauritanien du nom de Beibe Ould Nafi‘e accusé par Nouakchott d’activités terroristes en lien avec la nébuleuse Al Qaida au Maghreb Islamique (AQMI).
Du coup, les autorités mauritaniennes sortent de leur réserve habituelle pour désapprouver et même condamner par des déclarations publiques la démarche de la République sœur du Mali.
Le premier signal, officieux, est tombé dimanche soir, sous forme d’une protestation d’un porte-parole de l’Union Pour la République (UPR), principal parti de la majorité présidentielle et parlementaire, vouant aux gémonies la duplicité du gouvernement malien.
La précision relative au fait que le haut cadre de la formation au pouvoir parle uniquement au nom de l’UPR, semble avoir peu d’importance, vu la suite de l’évolution de cette nouvelle affaire qui met à rude épreuve bien des nerfs dans la sous région (Nouakchott et Alger).
Le sentiment et même la réalité de l’escalade verbale, se confirme quelques heures plus tard, avec une déclaration du Ministère des Affaires Etrangères et de la Coopération rendue publique dans la journée du lundi 22 février. Une sortie par laquelle la diplomatie mauritanienne qualifie la décision du tribunal de Bamako de « surprenante ». Le ministère rappelle, par ailleurs, que c’est la deuxième fois en quelques mois, que le gouvernement malien remet à des organisations terroristes islamistes des individus dont l’extradition a été réclamée par la justice de notre pays.
Des agissements à tendance récurrente, dans des circonstances « controversées » dont le caractère « non cordial » est mis en avant par le Ministère des Affaires Etrangères et de la Coopération pour montrer qu’elles s’inscrivent à contre courant des conventions dans les domaines de la coopération sécuritaire et judiciaire signés entre les deux pays.
Un constat qui justifie « l’indignation » de Nouakchott, le rejet de la décision des autorités maliennes et au-delà, le rappel, pour consultation, de notre ambassadeur à Bamako.

Bamako entre le marteau et l’enclume

En réalité, dans cette affaire qui suscite l’ire de Nouakchott, Bamako s’est retrouvée coincée entre le marteau de la France et l’enclume de l’Algérie. Cela, même au moment où Alger gardait encore le silence au niveau officiel, laissant à une partie de sa presse nationale, généralement « bien informée » la tâche d’exprimer officieusement une position de rejet de la décision malienne de libérer les quatre islamistes accusés de terrorisme. Par la suite, une journée après la réaction de Nouakchott, est intervenue celle, officielle, d’Alger qui a, également, rejeté la mesure prise par le Mali par rapport à cette affaire et rappelé son ambassadeur en poste à Bamako.
Le Mali aura finalement cédé aux pressions de l’ancienne puissance coloniale, La France qui s’est montrée dernièrement un peu trop présente dans la gestion d’un dossier sécuritaire, dans sa version terroriste attribuée à l’islamisme djihadiste, à l’intérieur de l’espace sahélo-saharien de plus en plus en proie à des troubles non sans liaison avec l’activisme de cette mouvance.
Paris tenait à sauver coûte que coûte la tête de l’ingénieur Pierre Camatte, enlevé au Nord Mali dans le courant du mois de novembre 2009. Pour y arriver, la justice malienne se devait de faire preuve de clémence à l’égard des individus dont la libération était réclamée par AQMI, avec en contre partie, la promesse d’une vie sauve pour le ressortissant français.
Une sorte de marchandage, vis-à-vis duquel le puissant voisin du Nord, l’Algérie, était opposé.
D’autant plus que ce dernier pays accepte mal l’implication de plus en plus visible de Paris dans le traitement de la question terroriste au niveau de la sous région.
Ce qui est, du reste, parfaitement conforme au vieux réflexe anticolonial d’Alger.
Alors, quelles suites pourrait avoir cette affaire, dans le cadre des « alliances » sous régionales et internationales de la Mauritanie ? Surtout dans la perspective d’une solution au problème des humanitaires espagnols et ressortissants italiens enlevés chez nous à la fin de l’année dernière ?

Cheikh Sidya

Source: Biladi

Mercredi 24 Février 2010
Boolumbal Boolumbal
Lu 233 fois



Recherche


Inscription à la newsletter