L’affaire Ibrahima Bâ devrait interpeller avec gravité les dirigeants du pays

L’affaire Ibrahima Bâ devrait interpeller avec gravité les dirigeants du pays, tout autant qu’elle a profondément choqué les Mauritaniens attachés à l’unité nationale, aux valeurs de justice et au respect de la dignité humaine.
La lutte contre l’immigration clandestine ne peut se mener sur la base de contrôles au faciès. Les personnes interpellées ne sont pas des délinquants pris en flagrant délit : il s’agit de simples vérifications de documents, aisément vérifiables, comme dans le cas de ce jeune homme. Il faut donc insister : ces vérifications doivent s’effectuer pour tous, dans le respect et la dignité de chacun.
Or, si le fils d’une lignée de bâtisseurs éminents de l’État a subi un tel traitement, alors même qu’il a clairement décliné son identité, ses origines et l’adresse de sa famille, que deviendrait un citoyen ordinaire dans la même situation ?
Cette campagne est d’une délicatesse extrême : elle risque aisément de se transformer en une chasse aux ethnies mauritaniennes, déjà fragilisées depuis des décennies, face au silence complice de certains.
Il est urgent de prendre des mesures publiques claires et des actes tangibles pour organiser la lutte contre l’immigration clandestine, garantir sa transparence et prévoir des sanctions contre tout abus. Si de tels excès continuent à être perpétrés impunément, que ce soit contre des citoyens de pays africains frères ou, à plus forte raison, contre des Mauritaniens discriminés pour leur couleur, ce sera la validation, par l’État lui-même, d’actes racistes inacceptables.
La Mauritanie est un pays qui a tout pour devenir merveilleux. Elle ne pourra y parvenir qu’en se restructurant autour de sa diversité assumée, dans l’égalité citoyenne, et par une gouvernance rigoureuse, honnête et réellement soucieuse du développement de tous.

Nana Mohamed Laghdaf