Gabon - Rose Rogombé : « Je sens qu’il y aura plusieurs candidatures »



Gabon - Rose Rogombé : « Je sens qu’il y aura plusieurs candidatures »
A Syrte en Libye depuis le 1er juillet dernier pour sa première sortie officielle, la présidente du Gabon prend part jusqu’au 3 juillet prochain au 13e sommet de l’Union africaine, à l’ouverture duquel un hommage a été rendu au défunt doyen des présidents africains par ses homologues du continent. Dans une interview accordée à RFI que nous publions in extenso, le chef de l’Etat gabonais revient sur le devoir constitutionnel que s’est imposé le Gabon pour sa transition politique. Sur la question des élections, la présidente n’a par ailleurs pas exclut la possibilité de candidatures indépendantes au sein du parti démocratique gabonais (PDG).


Le 8 juin, le président Bongo est décédé, alors comment combler ce vide maintenant ?

« Cela va être très difficile. Mais dans l’héritage qu’il nous a légué, en dehors de la paix et de l’unité, il nous a laissé les institutions. Donc depuis qu’il a été rappelé à Dieu, nous nous efforçons de respecter la Constitution. Nous allons essayer de nous en sortir, parce que c’est quand nous sortirons de la légalité que nous aurons des problèmes.

C’est toujours très difficile de remplacer un grand homme, du jour au lendemain, c’est difficile. Mais nous devons respecter la légalité, que lui même avait souhaité. Je suis sûre qu’il se disait « J’ai laissé les institutions, ils n’ont qu’à respecter les institutions », c’est comme s’il nous avait donné l’ordre de rester dans la légalité. Et je pense qu’en restant dans la légalité, je ne dirais pas que cela le remplacera, mais je crois que cela va nous permettre d’avancer un peu plus loin.

Pendant les deux jours qui ont séparé son décès et le moment où vous avez prêté serment, il y a eu des hésitations, il y a eu des flottements non ?

Je ne l’ai pas senti. J’ai prêté serment le 10 et je n’ai pas senti d’hésitations. Tout le monde était dans la douleur et tout le monde était serein. Il n’y avait pas d’attroupements, vraiment on a pas senti un flottement entre le 8 et le 10.

On s’est tout de même demandé s’il n’y aurait pas un coup d’Etat constitutionnel comme au Togo en 2005...

Le Togo c’est le Togo. Nous nous sommes au Gabon, nous le Gabon on a opté pour respecter la Constitution, et nous la respectons jusqu’à présent.

Alors quand est-ce que vous avez pris conscience que vous étiez la présidente ?

Même jusqu’à présent j’ai du mal à prendre conscience de cela, parce que c’était tellement inattendu pour moi. Maintenant je vis difficilement cette situation parce que je ne peux pas me réjouir parce que je n’ai pas été élue, je viens là par le jeu de la Constitution. Je suis dans la douleur, la tristesse, et en même temps il faut être la présidente de la République, j’ai même du mal à réaliser certaines choses.

Au début certains disaient que vous n’étiez pas un poids lourd du PDG, que vous pourriez être malléable, mais au final non, on s’aperçoit que vous êtes une femme de caractère...

Je dois vous avouer que j’ai le soutien de la classe politique actuelle. Je demande des conseils à pas mal de personnes et je pense que tout le monde collabore pour que nous continuons à œuvrer dans la paix.

Il y a eu un certain nombre de pressions sur vous quand vous avez remanié le gouvernement. Finalement vous avez gardé le premier ministre et vous avez changé le ministre de l’Intérieur, pourquoi ?

J’ai reconduit la même équipe, même ceux que j’ai déplacé ils sont quand même au gouvernement. Nous allons entré dans une période de campagne et notre but c’est de faire élire un nouveau président. Donc je n’avais aucune raisons de me séparer de collaborateurs que le chef de l’Etat lui même avait laissé en place.

Sauf avec le ministre de l’Intérieur ?

Non, le ministre de l’Intérieur c’est un collaborateur. Il n’est pas le seul à avoir changé de portefeuille.

Oui mais enfin, c’est un ministère sensible celui quand même, vu les élections...

Je n’ai pas trouvé cela comme quelque chose d’extraordinaire. J’ai trouvé cela normal. Tous les autres ministres qui ont changé de portefeuille, cela n’a pas posé de problèmes, pourquoi y aurait-il un problème seulement pour le ministre de l’administration du territoire ?

Alors cette présidentielle quand est-ce qu’elle aura lieu ?

Nous essayons de rester dans la ligne du délai que nous impose la Constitution. Si jamais cela n’est pas possible, il y a d’autres institutions qui fonctionnent qui sont là, il y a des spécialistes qui vont nous dire s’il on peut constater un cas de force majeure comme le prévoit la Constitution, et puis prolonger d’un délai pas trop court, pour ne pas donner l’impression que nous voulons bâcler, et pas trop long non plus car on rentrerait dans l’illégalité.

Et si nous devons demander une prorogation, parce que quand même c’est un problème important, il y a le fichier électoral, les cartes d’identités, le problème d’état civil, c’est quand même compliqué, donc si le délai de 45 jours ne suffisait pas, on pourrait voir avec la Cour Constitutionnelle, avec les institutions qui sont autorisées à constater le cas de force majeur et à prolonger le délai.

Les partis de l’opposition que vous avez reçu la semaine dernière vous ont demandé une prolongation de 5 à 6 mois pour un bon peignage des listes électorales...

Effectivement ils ont demandé une prolongation de 3 mois, 4 mois, 5 mois, parfois même jusqu’à 6 mois, mais ils ont oublié que ce sont eux qui avaient voulu, à la sortie de la Conférence nationale, que ce soit 45 jours au plus. Bon, ils le demandent mais nous aussi ne voulons pas faire l’erreur de suivre les avis des uns et des autres qui sont contraires à la Constitution, parce qu’après, je ne serais plus couverte par la loi. Donc nous voulons rester prudents dans le cadre de la Constitution.

Franchement, croyez vous qu’un délai de 60 jours comme le propose le PDG suffira ?

Oui on peut. Puisque le fichier électoral que les partis de l’opposition contestent maintenant, les sénateurs et les députés de l’opposition qui sont au Parlement ont été élus sur la base de ce même fichier électoral. Maintenant on va voir ce que les spécialistes peuvent nous accorder comme délais.

Madame le président vous êtes populaire au Gabon. On l’a vu pendant les obsèques où vous aviez été applaudie. N’est pas aussi parce que vous êtes la personne qui empêchera un scénario à la togolaise avec un succession dynastique en faveur d’Ali Bongo ?

Nous ne sommes plus au stade du Togo. Ici nous sommes au Gabon, nous parlons d’élections et tous les gabonais sont libres de se présenter. D’ailleurs je sens qu’il y aura plusieurs candidatures. Vous savez que nous les femmes on sent toujours les choses venir, et quand je regarde un peu je me dis qu’il y aura sûrement plusieurs candidatures.

Au sein du PDG ?

Peut être, pourquoi pas ? Il faut s’attendre à tout.

En tout cas il y aura des primaires ?

Je ne sais pas s’il y aura des primaires, parce que nous avons opté pour le consensus et on va essayer de gérer cela au maximum pour que nous n’allions pas aux primaires. Parce que vous savez que les primaires ce n’est pas toujours juste. Vous avez l’exemple chez vous en France, ce n’est pas toujours juste.

Le parti socialiste français...(rires)

Vous avez tout compris (rires).

Est ce qu’il n’y a un candidat naturel au sein du PDG ?

Eh bien pour l’instant on ne peut pas parler de candidat naturel puisque le président est parti sans nous laisser un nom, sans nous dire quelque chose. Le PDG va certainement investir un candidat, ils se mettront d’accord auparavant sur un. Mais il ne faudrait pas qu’on soit surpris si des candidatures indépendantes se glissent. Vous savez en politique, il faut s’attendre à tout.

La Constitution vous interdit d’être candidate, mais avez vous une préférence ?

Non, je considère que je suis là pour assurer l’équilibre et je ne peux pas influencer les électeurs sur tel ou tel candidat.

Vous resterez neutre ou bien vous ferez connaître quand même votre préférence ?

Non je ne ferais pas connaître ma préférence, parce que si je le fais cela veut dire que je vais orienter l’électorat. Il faut laisser le droit parler ».

Source : Ferloo.com

Dimanche 5 Juillet 2009
Boolumbal Boolumbal
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