Enrôlement: Safran, partenaire de la Mauritanie, jugé en France pour corruption



Enrôlement: Safran, partenaire de la Mauritanie, jugé en France pour corruption
Le groupe français Safran, partenaire du gouvernement mauritanien dans "la réforme de l'état civile", est l'objet d'un procès à Paris. Il aurait versé, entre 2000 et 2003, des pots de vin à des hauts responsables au Nigéria.

En effet, des peines de 15 et 18 mois de prison avec sursis ont été requises, mercredi 6-6, à l'encontre de deux cadres du groupe français d'électronique et de défense Safran (ex-Sagem), jugés à Paris pour la "corruption active" d'agents publics nigérians entre 2000 et 2003, nous apprend le 6 mai La Croix.

En Mauritanie, la filiale Morpho du Groupe SAFRAN avait remporté en 2010 le contrat de sécurisation des documents d’identification "pour 18 M€, devant le chinois ZTE pourtant moins-disant à 9 M€", selon le site officiel France Diplomatie. Le contrat a été signé le 11 juillet 2010, mais les formalités de l'enrôlement, jugées discriminatoires contre les noirs, ont suscité une forte contestation de la part de jeunes négro-mauritaniens.

Selon les termes du contrat, Morpho garantira l’émission fiable et hautement sécurisée des documents d’identité des citoyens et résidents (cartes d’identité multi-applicatives, passeports à page polycarbonate, cartes de séjour et permis de conduire) grâce à la dernière version de son système multibiométrique de reconnaissance d’empreintes digitales et de visages. Ce programme de dernière génération intègrera aussi un système de contrôle aux frontières « Mauritania Visit » pour la gestion des flux migratoires (délivrance et contrôle de visas biométriques) ainsi qu’un système de reconnaissance d’empreintes digitales permettant la lutte contre le terrorisme et la haute criminalité.

Dans ce procès, le groupe Safran est lui-même jugé en tant que "personne morale" pour avoir "avalisé" les paiements parvenus sur des comptes d'importants responsables nigérians. Mais le parquet n'a pas requis de sanction précise à l'encontre de la société, laissant le tribunal apprécier.

Safran s'était vu attribuer en 2001, sous la présidence d'Olusegun Obasanjo, un énorme contrat de 214 millions de dollars (171 millions d'euros) pour la fourniture au Nigeria de 70 millions de cartes d'identité.

En mai 2005, M. Obasanjo avait pris à partie l'ancien directeur général de Safran, lui lançant durant un colloque: "Sagem n'avait pas besoin de graisser la patte de qui que ce soit, mais malheureusement, vous l'avez fait".

Certains pots-de-vin avaient atteint jusqu'à 500.000 dollars (plus de 380.000 euros), selon l'accusation, qui mentionne virements, chèques et montres Rolex offertes. La procureure a vanté la bonne coopération internationale ayant permis de "suivre à la trace les paiements": plus de 4 millions de dollars avaient ainsi été versés à de hauts responsables nigérians - dont le défunt ministre des affaires intérieures, Sunday Afolabi - par le biais de deux sociétés intermédiaires présidées par le Nigerian Niji Adelagun.

"Jean-Pierre Delarue (jugé en tant qu'ancien ingénieur commercial de Sagem au Nigeria, ndlr) savait parfaitement ce qui se passait avec l'argent versé à M. Adelagun qui arrosait des fonctionnaires et gouvernants", a affirmé la procureure. Elle a également rejeté "la litanie des 'je ne savais pas'" de François Perrachon, qui dirigeait à Paris le département "systèmes d'identification" de Sagem et reste aujourd'hui directeur commercial de Morpho (Safran).

La magistrate a cependant souligné "la dilution des responsabilités dans une aussi grosse structure" que Sagem (ayant fusionné en 2005 avec le motoriste aéronautique Snecma pour former Safran, dont l'Etat détient 30%). Elle s'est interrogée sur la sanction pénale pour ce type de "faute quasiment collective".

Pour la défense de Safran, Me Bernard Casanova a plaidé que Sagem, "leader mondial des systèmes d'identification biométriques", n'avait eu "aucun besoin de corrompre parce qu'il était le meilleur" dans ce domaine de la fourniture de cartes d'identité.

Présentant Safran comme une "étoile au firmament" dans le paysage industriel français "délabré", Casanova a assuré que sa doctrine était "corruption: tolérance zéro". "Aujourd'hui, il est établi qu'il y a bien eu des pots-de-vin versés", a-t-il concédé. "Mais à l'époque, cela s'était fait à l'insu" du groupe, a-t-il soutenu.




AKHBAR

Jeudi 14 Juin 2012
Boolumbal Boolumbal
Lu 547 fois



Recherche


Inscription à la newsletter