Les Marchés Publics : La Gabegie en plein air



Les Marchés Publics : La Gabegie en plein air
Le credo du nouveau pouvoir, lutte contre la gabegie avec en toile de fond, l’assainissement des finances publiques et la promotion de la bonne gouvernance butte sur des mentalités et des comportements dont apparemment les haut fonctionnaires ont du mal à se départir. « La mère de toutes les batailles » pourrait avoir pour champs la Commission Centrale des Marchés (CCM). Structure bâtarde, mais rattachés au Premier Ministre dont le Président est l’un des conseillers, la CCM n’en finit pas de faire des vagues. A chaque marché public son lot de protestations et de réclamation parfois justifiées et parfois procedant du simple manque de fair-play chez les concurrents malheureux.


En principe, la compétition entre les opérateurs devrait être équitable et transparente, dans les faits la CCM et parfois les Administration demandeuses ont recours à divers subterfuges pour contourner la réglementation. En principe l’attribution des marchés est régie par le Décret 2002-08 du 12 Février 2002 portant Code des Marchés Publics. Ce code des marchés publics a pour objet de définir les règles de mise en concurrence pour ce qui concerne l'achat de fournitures, de prestations de services ou de travaux par les personnes publiques (ministères, services déconcentrés de l'État, Établissements publics, collectivités locales etc...).
La mise en place d’une CCM, consacrée par ce décret vise à résoudre un problème important. Celui des litiges et différends nés de la passation et de l’exécution des marchés publics.
La CCM a pour mission principale de contrôler des dossiers d’appel d’offres et les dossiers d’approbation, la régularité des procédures de passation des marchés publics et des conventions et de l’exécution de ces marchés. Elle centralise et diffuse la réglementation et toute autre information sur la commande publique. Cette commission joue aussi le rôle de conseil, d’assistant technique et juridique auprès de acheteurs publics. L’appréciation de l’obligation de passer par la procédure d’appel d’offre et le respect de l’arrêté fixant les seuils de cette obligation, pour toute dépense de travaux, fournitures ou services, font entre autres, partie de ses attributions.
Cependant malgré les dispositions du décret précédemment cité la CCM a tendance à faire de l’exception la règle.
En effet en son Article 40 le décret limite la procédure d’Appel d’offres restreint « lorsque les besoins à satisfaire relèvent de fournitures, prestations ou travaux spécialisés ou requérant une technique particulière ou auxquels peu de candidats sont capables de répondre », « Le recours à cette procédure dérogatoire » est soumis à un certain nombre de règles mais sur lesquelles la CCM est souvent peu regardante. Deuxième règle exceptionnelle mais qui a tendance elle aussi à se généraliser c’est la procédure du gré à gré. L’Article 44 du Code des marchés publics prévoit la procédure du marchés de gré à gré : « lorsque l’exécution des prestations ne peut être réalisée que par un entrepreneur, un fournisseur ou un prestataire de services déterminé. Il en est ainsi dans les cas suivants : Lorsque les besoins ne peuvent être satisfaits que par une prestation nécessitant l’emploi d’un brevet d’invention,(dans le texte de loi c’est écrit invitation) d’une licence ou de droits exclusifs détenus par un seul entrepreneur, un seul fournisseur ou un seul prestataire de services (‘monopole de droit).
Ainsi en passant en revue le PV de réunion de la CCM de ces trois derniers mois on ne peut qu’être frappés par la quantité de marchés qui justement font appel à ces procédures censées être exceptionnelles. C’est à croire que les Administration se font un malin plaisir à passer commande pour du matériel ou des services que tout le monde ne peut pas exécuter.

Voyons plutôt : le Ministère de l’Hydraulique et de l’Assainissement par lettre n° 0006/MHA/SG du 05 janvier 2010, demande l’approbation d’un marché de gré à gré avec le GROUPEMENT BURGEAP/TENMYA/HYDROCONSEIL pour la réalisation des prestations d’Ingénieur Conseil du PEGG.
Le PANPA par lettre n° 005/10/PANPA/DG du 05 janvier 2010, demande l’autorisation de passer un marché suivant la procédure du gré à gré avec la société CFAO TECHNOLOGIES-SENEGAL pour l’acquisition d’une machine AS/400 et de quinze (15) terminaux pour l’exploitation du système d’information du Port Autonome de Nouakchott.
Pour sa part le Ministère des Affaires Economiques et du Développement par lettre n° 0008/MAED/SG du 11 janvier 2010, demande l’autorisation de passer un marché suivant la procédure de la consultation simplifiée des fournisseurs pour l’acquisition des équipements de 14 unités de production de tables bancs destinés à la formation technique et professionnelle.
Le Ministère de l’Habitat de l’Urbanisme et de l’Aménagement du territoire qui ne veut as être en reste par lettre n° 0037/MHUAT/SG/DB du 14 janvier 2010, demande l’approbation du projet de marché suite à un gré à gré passé avec la société EBS pour la construction d’une prison civile à Aleg. Alors qu’il est de notoriété publique que les entreprises mauritaniennes de construction se tournent les pouces depuis l’arrivée des entreprises chinoises sur le marché.
Bien entendu le même ministère demande tout simplement par lettre n° 0032/MHUAT/SG/DB du 11 janvier 2010, l’autorisation de reconduction des marchés pour l’entretien des bâtiments administratifs à Nouakchott sans même lancer un nouvel appel d’offre.
Pour sa part le Commissariat aux Droits de l’Homme à l’Action Humanitaire et aux Relations avec la Société Civile par lettre n° 001/CDHAHRSC du 12 janvier 2010, demande l’autorisation d’une consultation simplifiée pour la réalisation d’une digue de protection de la ville de Monguel contre les eaux de pluies.
Le Ministère des Finances quand à lui il demande par lettre n° 0021/MF/SG du 18 janvier 2010, l’autorisation de marché suivant la procédure du gré à gré avec la société canadienne CBN&CO pour l’impression d’un nouveau quittancier. En fin le Ministère de l’Equipement et des transports demande par lettre n° 0098/MET/SG du 14 mars 2010, l’autorisation de signer un marché de gré à gré pour la confection d’un modèle financier et étude des coûts totaux de passage portuaire dans le Port Autonome de Nouakchott.
En seulement trois mois des centaines de millions voire des milliards de fonds publics ont été dépensé par des règles exceptionnelles érigées en règles tout court.
Il est certain au regard des prestations que ces procédures ne se justifient pas souvent mais que voulez vous il faut bien que nos fonctionnaires arrondissent leurs fins de mois. Surtout que sous l’ère du Changement les opportunités sont de plus en plus rares.
MSS


Source: Quotidien Nouakchott

Mercredi 7 Avril 2010
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