Le fils du président, le berger et les journalistes



Jedna Deida et Babacar Baye Ndiaye, respectivement directeur du site mauriweb.net et webmaster de Cridem.org ont été libérés vendredi dernier non sans avoir passé une nuit dans la prison centrale de Nouakchott.

Comme toutes les fois qu’un journaliste est ciblé pour s’être exprimé, de nombreux confrères ont organisé un sit-in devant la prison civile de la capitale avant de battre le pavé en direction du ministère de la justice pour exiger la libération immédiate et inconditionnelle de leurs camarades.

Encore une fois, Jedna et Babacar sont libérés en vertu d’une liberté provisoire, un expédient judiciaire qui permet de sortir son ennemi de prison tout en gardant la possibilité de l’y remettre au moindre accroc ultérieur. Comme pour dire aux responsables de Mauriweb.net et de Cridem.org, attention, évitez d’évoquer l’affaire pour laquelle vous avez enduré une nuit entière en prison, sinon vous risquez d’y séjourner plus longtemps.

Il est reproché aux deux journalistes Jedna Ould Deida et Babacar Baye Ndiaye, d’avoir écrit (Jedna Deida) et relayé (Babacar Baye Ndiaye) des informations sans fondement et diffamatoires, mettant indûment en cause le fils du président mauritanien, Bedr ould Abdel Aziz.

La plainte avait été déposée mercredi 6 avril à la suite de la parution sur le site Mauriweb d’un article accusant le fils du président mauritanien Beder d’avoir tiré à balle réelle sur un berger, dans le ranch de son père situé dans la région de l’Inchiri au nord du pays. L’article a ensuite été repris par le site Cridem.org pour lequel travaille Babacar Baye Ndiaye.

L’article incriminé souligne par ailleurs que "Bedr est n’en est pas à son coup d’essai", et rappelle que ce dernier "avait tiré à bout portant, en 2012 sur une fille" et que "lui même avait reçu en 2014, une balle par inadvertance de la part de l’un de ses amis".

Bref, l’affaire est partie d'une information relative à l’évacuation à l’hôpital militaire de Nouakchott d’un berger qui a été blessé par balle, la semaine dernière.

Les journalistes semblent s’être laissés aller à des supputations pour accuser à tord le fils de président sur la base des seuls précédents ayant défrayé la chronique de la presse à scandale friande de ce genre d’évènements. Les journalistes doivent faire preuve de mesure à l’égard de la réputation des autres, sans outrepasser les limites.

Mais, d’un autre côté, la justice a-t-elle fait réellement son travail ? Comment se fait-il qu’un citoyen mauritanien fût-il simple berger se fasse blesser par une balle sans que nos policiers, nos gendarmes et nos magistrats, pourtant curieux, n’y mettent le nez ?

Comme pour accorder à l’entourage du président de la République – qu’il s’agisse de fils, de neveux, de cousins, de parents plus moins proches ou de n’importe quel pique-assiette qui ne manquent sûrement pas dans le ranch présidentiel – de tirer sur des cibles humaines en la personne d’une pauvre fille ou d’un misérable berger sans que la justice ne mette en branle son dispositif ? Est-ce à dire que l’entourage présidentiel est intouchable et que rien d’autre ne l’est ? Ceux qui croient que la Constitution l’était risquent de se mettre le doigt dans l’œil.

Pauvre Mauritanie !


Source: Le Rénovateur Quotidien

Lundi 11 Avril 2016
Boolumbal Boolumbal
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