Rencontre avec Yaya Dia, artiste théâtral en pulaar, soninké et Ouolof



Rencontre avec Yaya Dia, artiste théâtral en pulaar, soninké et Ouolof
Yaya Dia est un artiste sénégalais d’ethnie pulaar. Président et membre fondateur du groupe théâtrale « Timtimol », célèbre pour ses films DVD en langue nationale pulaar, mais aussi Ouolof et Soninké, il séjourne dans nos murs depuis quelques temps. Objectif : réaliser 5 à 6 films DVD à Nouakchott. Derrière cette activité se cache le besoin de diversifier le public amoureux du théâtre mais aussi de rechercher des financements pour pouvoir produire, monter et vendre les films. Ce n’est pas facile, faute de moyens et de soutiens des nantis. Il s’y essaie quand même.


Il n’est pas à son premier séjour à Nouakchott. Le précédent remonte au 19 décembre 2000 dans une tournée d’un mois avec Abou Diouba Deh, un chanteur peulh bien connu du public Nouakchottois et du pays profond. A la fin de ce périple marathon à travers tout le pays, d’Est en Ouest, du Nord au Sud, il laisse la délégation repartir sur Dakar, pour se rendre à Nouadhibou où il est réclamé avec insistance par ses fans. Dans la capitale économique, Yaya Dia réalise le film « Dimo Ko Kungul Moom » (Ndlr : le respect de la parole donnée est signe de noblesse) avec des personnes triées sur le volet et qu’il a formé en quelques jours pour les besoins du film. Lequel a été réalisé, monté et vendu à Nouadhibou avec le financement d’une ressortissante mauritanienne résidente à Nouahibou, Mme Néné Diéri Bâ.
A Nouakchott où il a pris ses quartiers généraux à El Mina en ce moment, il a été contacté par un groupe théâtral nommé « Yonta Handé », créé par un mauritanien, M. Ousmane Bâ, aveugle de son état. Le groupe souhaitait réaliser un film DVD en pulaar. Après discussion sur le montant du cachet, je l’ai réalisé sur le thème retenu « Fagudu Bidoo » (la richesse d’un fils). Il y a tout juste 15 jours que le film DVD est sorti. Yaya Dia compte rester en Mauritanie le temps qu’il faudra pour réaliser environ 6 films. Deux l’ont été et il en reste quatre autres.
Le Quotidien de Nouakchott l’a rencontré pour ses nombreux lecteurs parmi lesquels, il compte plusieurs fans. Né en 1968 de père et de mère peulh, il raconte à travers cet entretien comment il s’est fait un nom dans le milieu de l’art, de la création du groupe théâtral « Timtimol », des difficultés du métier etc…

Quotidien de Nouakchott : Qu’est-ce qui vous poussé à opter pour ce type de métier ?

Yaya Dia : D’abord permettez-moi de remercier le journal pour m’avoir donné l’occasion de parler au public mauritanien et surtout encore à mes fans. Je suis né en 1968 de parent peulh et jusqu’à l’âge de 17 ans je ne parlais pas ma langue maternelle. Je ne parlais que Ouolof. Alors un jour accompagné d’une amie, nous voulions entrer dans un théâtre à Dakar. On m’a refusé l’accès prétextant que je ne parlais pas pulaar. Choqué, j’interpellais mon père dès le lendemain, pour lui demander qui nous étions réellement.
Il me fit mon arbre généalogique pour me dire que j’étais un descendant de Abdoul Ghadre Kane de Kanel. C’est ainsi qu’en 1998, je décidais à aller apprendre ma langue maternelle, le pulaar durant un an. J’alternais mon apprentissage entre Ourossogui, Ogo, Cédo Cebbe, et Sémé.
Par la suite, sur proposition d’une actrice avec laquelle j’ai travaillé dans la troupe « Daray Kocc », j’ai intégré l’équipe d’un nouveau groupe théâtral dénommé « Lewru ala faayooré » jouant le rôle du marabout dans le film à deux épisodes « Guilli » (l’amour). Après cela j’ai proposé au producteur du groupe, M. Moustapha N’Daw, la réalisation d’un film intitulé « Bingu Baaba » à condition de jouer le rôle principal. Le film fut un grand succès et me fit découvrir au public international. Ensuite j’ai réalisé plusieurs films dont « Alaa to Yaanoo arti to yaanoo » (retour à la case départ), un film plus connu sous le nom de Yaya Suisse compte tenu de son succès à l’étranger.

Comment a été créé le groupe « Timtimol » ?

En fait le groupe « Lewru alaa faayooré » avait décidé de faire son chemin seul et de se faire une marque. C’est ainsi que notre doyen au théâtre, M. Korka Diallo et moi, nous avons créé le groupe théâtral « Timtimol ». De là, j’ai décidé de m’investir pour sensibiliser et mobiliser mes concitoyens peulh qui ne parlent pas la langue maternelle pulaar, pour qu’ils l’apprennent à travers le théâtre. On a réussi ce pari mais c’est loin encore d’être gagné encore. Il n’y avait pas que ça à faire, il fallait aussi maîtriser la production parce qu’on ne voulait plus accepter d’être exploité par les producteurs. Donc je suis allé subir une formation à Dakar durant quatre ans sur toute la filière. Maintenant les finances font défaut. Vous comprendrez que le parcours est jalonné d’embûches. C’est le prix à payer si l’on veut être totalement indépendant. Une telle situation m’a amené à aller à la recherche de financement. J’ai alors pris contact avec un immigré sénégalais à Paris du nom de N’Diaye Demba Hamat. Il a alors accepté de financer notre premier film intitulé « Le retour de Korka Diallo ».

Connaissez-vous la maison des cinéastes à Nouakchott ?

Non je ne connais pas !

Quelles sont en ce moment vos difficultés?

Ecoutez, ces difficultés sont surtout d’ordre matériel (Caméra professionnelle, ordinateurs et autres). Il y aussi qu’ici, j’ai eu à prendre contact avec les journalistes de la radio et de la télévision qui animent les journaux en langue nationale mais je peine encore à passer dans l’émission en langue pulaar. Je comprends pas pourquoi et aucune raison ne m’a été avancée. Seule TVM plus s’est entretenu avec moi sur ses ondes en Ouolof. Je ne désespère pas de voir les autres animateurs s’intéresser à faire connaître au public mauritanien dans lequel nous comptons de nombreux fans, le groupe théâtral « Timtimol ».

Votre conclusion

Mes sincères remerciements au journal « Le Quotidien de Nouakchott » pour cette opportunité qu’elle m’a offerte de parler de théâtre. Je remercie aussi Ibrahima Moctar Sarr, membre fondateur de l’émission « Andu sa andii andiin » de Radio Sénégal relayé par la suite par feu Tidjane Anne. Je remercie enfin tout le public mauritanien et surtout nos fans qui se trouvent sur l’ensemble du territoire mauritanien ainsi que Alioune Sow, Adama Diop, Fama Labo, Maïmouna Sall et Aïssata Bâ, Papa Diallo et Dondé Diallo sans oublier Ami Bâ de TVM plus.

Moussa Diop



Source: Quotidien Nouakchott

Jeudi 13 Mai 2010
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