Medias : Un nouveau fiasco à la TVM



Medias : Un nouveau fiasco à la TVM
« La TVM n’est intéressante que quand on la capte pas» a dit un citoyen mauritanien. Les mauritaniens sont friands de débats contradictoires. Leur télé nationale fait, 24 heures sur 24, dans la pensée unique.


Une fois encore notre TVM nationale fait face à un nouveau flop dans la mesure où le grand débat de politique annoncé à grand renfort de publicité s’est transformé en véritable bide. Depuis que le général Mohamed Ould Abdel Aziz avait clairement énoncé au cours d’un Conseil des Ministres sa volonté d’ouvrir les medias publics à tous, et que le ministre de la Communication en avait fait l’annonce au cours de son traditionnel point de presse, l’opinion publique attends avec impatience la traduction de cette volonté politique dans les faits. Mais vite, très vite on dut se rendre compte de la difficulté à mettre cela en œuvre d’autant plus que l’on veut faire du neuf avec du vieux. Les pesanteurs, les résistances, les vieilles habitudes et tout simplement la mauvaise volonté ont vite fait de faire échouer le projet. C’est à croire que la TVM a tout fait pour qu’il n’y ait pas de débat.
Les leaders de l’opposition avaient manifesté leur enthousiasme mais en exigeant que les détails pratiques soient arrêtés en commun. Pourtant alors que l’on discutait encore sur le niveau des participations (présidents de partis ou leurs représentants) la TVM s’empresse de diffuser un communiqué deux semaines avant le délai. Au même moment la Coordination de l’Opposition Démocratique (COD) par la bouche de Mohamed Lemine Ould Biyé, membre de sa commission communication démentait l’existence d’un accord en révélant que la COD n’avait pas encore tranché définitivement la question de sa participation au débat. Mohamed Lemine a expliqué que « les partis d’opposition restent attachés à l’idée d’un tel débat, notamment quand il s’agit de questions préoccupante pour l’opinion publique, mais qu’il convient à, ce que le contenu de ce débat ne soit pas dicté, unilatéralement par la TVM. » Il semble que la véritable pierre d’achoppement qui a fait échouer le débat est la question de l’intervention au téléphone des téléspectateurs. La TVM y tenant coûte que coûte alors que l’opposition pense que ce serait l’occasion pour la régie de la TVM de sélectionner qui elle veut faire intervenir et donc déséquilibrer le débat.
Il faut dire que la TVM n’a jamais été prompt à organiser les débats contradictoires, c’est même un exercice que ses présentateurs « vedettes » du moment proscrivent et abhorrent.
Finalement la TVM proposa que la première heure se passe sans intervention des téléspectateurs mais qu’on leur permette d’intervenir au cours de la deuxième. En revanche elle resta ferme sur le sujet à savoir « rôle des partis politiques dans la lutte contre la gabegie » alors que les leaders de l’opposition veulent embrasser tous les sujets.
Rappelons nous durant la campagne présidentielle, la direction de la campagne du candidat Mohamed Jemil Ould Mansour avait invité tous les candidats aux présidentielles 2009 à une confrontation directe, radiotélévisée pour exposer, défendre et confronter leurs programmes.
Alors que toute chaîne sérieuse soucieuse de son audimat aurait sauté sur l’occasion pour la réaliser notre TVM fit la sourde oreille et préféra regarder ailleurs.
Quelques mois plutôt vers Février 2009 et alors que l’actualité était dominée par les questions liées au pétrole l’ancien ministre sous la Transition Mohamed Ali Ould Sidi Mohamed Réagissant à un programme enregistré, concernant le pétrole et l’énergie en Mauritanie, animé par Monsieur Amar Ould Bouhoubeyni et dont l’invité était Monsieur Dy Ould Zein, Ministre du Pétrole et de l’Energie, engagea une polémique avec son successeur tout en proposant que la télévision de Mauritanie organise un débat télévisé transmis en direct, sur les politiques du pétrole et de l’énergie en Mauritanie, débat auquel il se proposait de participer volontiers. Ce débat selon lui, permettra « d’éclairer les téléspectateurs sur ces secteurs dans notre pays en toute franchise, transparence et responsabilité. Il permettra aussi de lever un certain nombre d’équivoques, de corriger les contrevérités et de situer les responsabilités. » C’est évidemment un scoop qu’aucune chaîne sérieuse n’aurait dédaigné, pas notre TVM nationale qui une fois encore se caractérise par son silence assourdissant.
La pluralité dans les médias officiels a par le passé souffert du refus des membres du FNDD d’assister à un débat télévisé diffusé en différé. La classe politique et à juste raison ne fait pas confiances aux medias d’Etat, surtout après leurs dérapages enregistrés depuis le 6 août. M. Messaoud Ould Boulkheir avait indiqué la semaine dernière, au cours d’une session plénière de la chambre basse, qu’il interdira désormais à la TVM la couverture des activités du parlement, si elle persiste à censurer les interventions des députés ou à leur attribuer des propos qu’ils n’ont pas tenus.
Le parti Adil avait vivement dénoncé, la semaine dernière, la censure selon lui opérée par la TVM sur l’intervention de sa vice-présidente Noma Mint Mogueya à l’assemblée nationale, précisant que cet acte est contraire aux critères de professionnalisme que tout média public doit scrupuleusement respecter.
Sous d’autres cieux, les Télévisions se battent pour avoir l’exclusivité de la diffusion de tels programmes, généralement très prisés par les téléspectateurs.
La France a été en 1974, l’un des premiers pays à diffuser un débat télévisé entre les candidats à la présidence. C’est seulement lors des élections de 2005 qu’un débat télévisé fut organisé pour la première fois en Allemagne entre les candidats à la chancellerie. Et en Grande-Bretagne, cette pratique n’est pas encore entrée dans les mœurs bien qu’elle soit régulièrement souhaitée.
Ces débats crèvent le plafonds des audimats (23 millions pour le débat de 1974 diffusé il est vrai sur les trois chaînes françaises; presque 17 millions pour le dernier débat en 1995).

Tout débat doit suivre des règles qui définissent son déroulement (ce qu’on appelle généralement le format du débat). Ces règles concernent notamment :
- la durée du débat et de ses différentes phases ;
- les rôles des différents participants et les modalités de leurs interventions ;
- l’agencement du lieu du débat et la position des débatteurs ;
- les modalités de cadrage. Ainsi en France, les plans de coupe (cadrage sur un candidat pendant que l'autre parle) ont été jusqu'à présent systématiquement refusés lors des débats du second tour.
En général, on considère que chacun des débatteurs doit disposer du même temps de parole. C’est en quelque sorte l’application au débat politique d’un des principes de base de toute démocratie : l’égalité des citoyens.

Donc nonobstant l’utilité des débats politiques qui est incontestable, nous ne pouvons que déplorer que nos medias publics n’aient pas encore fait leur « révolution.» Ils se considèrent toujours des medias gouvernementaux au service d’un régime alors qu’ils doivent être des services publics au service des citoyens.
Bouna Cherif
Source: Quotidien Nouakchott



Mardi 5 Janvier 2010
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