Finances 2010 Un budget qui ne favorise pas la bonne gouvernance



Finances 2010 Un budget qui ne favorise pas la bonne gouvernance
Malgré son approbation par les deux chambres du Parlement, le budget de l'Etat pour l'année 2010 ne favorise ni la bonne gouvernance ni le développement du pays. Il ne faut pas être un " expert " pour se rendre compte que le budget concocté par le Gouvernement et voté par le Parlement mauritanien comporte beaucoup d'aspects insolites qui, si la Majorité n'était pas aveugle étant acquise complètement au pouvoir en place, ne pouvaient pas passer comme une lettre à la poste.

Il est vrai que députés et sénateurs ont exercé, de manière souvent inattendue, leurs droits à la critique. Certains parlementaires de la Majorité ont même été plus acerbes que leurs collègues de l'Opposition. A l'image du sénateur de Kiffa qui a critiqué ouvertement " l'accaparement d'un quart du budget de l'Etat par le ministère de la Défense (30 milliards d'ouguiyas), le département de l'Intérieur (20 milliards) et la Présidence de la République (2 milliards) ", dira-t-il. Une critique partagée par son collègue de Ouadane, qui s'est élevé contre la surtaxation de certains produits de base (riz, hydrocarbures) et l'augmentation de certains impôts, soulignant que cela ne va, assurément pas, avec les prétentions de lutte contre la pauvreté du gouvernement ni même avec le surnom donné par les démunis au président de la République, Mohamed Ould Abdel Aziz.

Et il est vrai que, à la lecture de la nomenclature de ce nouveau-ancien budget, on a l'impression que ses concepteurs ont convenu, tout simplement, de cet adage qui dit : " on prend les mêmes et on recommence " !

On peut accepter, comme le soulignera le ministre des Finances, dans sa réponse aux sénateurs, que la confection d'un budget nécessite du temps et que le celui-ci a cruellement manqué au gouvernement actuel qui n'est en place que depuis le mois d'août 2009, mais est-ce une raison suffisante pour ne pas aller, résolument, dans le sens de la bonne gouvernance ?

Les sénateurs n'ont-ils pas raison, en effet, de dénoncer le flou - artistique - qui entoure des rubriques comme : " autres dépenses ", " imprévus ", " dépenses communes " dotées de milliards d'ouguiyas dont l'utilisation est quelquefois des plus acrobatiques ?

Comme il en va également des Fonds régionaux de développement (FRD), requinqués de 3.000.000.000 d'ouguiyas destinés à financer des projets dont le choix revient aux autorités régionales et à des " commissions " non exemptes de commissions.


Partage inégal

des ressources


La question soulevée par le sénateur de Kiffa pose, une fois de plus, la problématique de l'allocation des ressources. Certes, la sécurité intérieure et extérieure du pays n'a jamais revêtue autant d'importance que celle qu'elle a par les temps qui courent.

Si l'on peut comprendre aisément que le budget consacré à la sécurité doit être augmenté considérablement, il y a lieu aussi de penser que les départements de la Défense et de l'Intérieur doivent être soumis à l'obligation de résultat par un président qui, à son élection, avait fait de la lutte contre le terrorisme l'un des axes de sa politique. Et cette bataille est loin d'être une balade de santé.

Du sanglant attentat de Lemghayti en 2005 avec ses 17 victimes, à l'attaque meurtrière de Tourine en septembre 2008, en passant par celle de Ghallaouiya en 2007 avec trois soldats tués, l'armée mauritanienne, non préparée à une telle guerre, de l'aveu même du président Mohamed Ould Abdel Aziz, a déjà payé un lourd tribut. Des cellules de la branche maghrébine d'Al Qaïda sont implantées dans certains pays voisins de la Mauritanie, ou peut-être même sur le sol mauritanien. Si l'attaque de Lemghayti, le 5 juin 2005, avait été présentée comme une opération visant à ravitailler le GSPC et à faire peur aux Mauritaniens, celle de Tourine en septembre 2008 ouvre la voie à la guerre ouverte. Elle s'inscrit dans la lignée des autres opérations dont certains pays du Maghreb arabe ont été le théâtre ces dernières années ".

La défense et la sécurité du pays sont donc un axe prioritaire de la politique du gouvernement. Il faut comprendre cela un peu à l'image de " l'effort de guerre " qu'Américains et Européens mènent en Afghanistan pour venir à bout des réseaux terroristes d'Al Qaeda.

Faut-il comprendre, pour cela, que le développement doit encore attendre ? Les secteurs sociaux qui souffrent depuis plusieurs années, non pas de l'allocation de ressources conséquentes mais de leur bonne exécution, sont cette année des chapitres revus à la baisse. Un sénateur s'est même demandé comment la Mauritanie qui disposerait de quelque 21.000.000 têtes de bétail, toutes catégories confondues, peut se permettre d'ignorer le profit considérable qu'elle peut tirer d'une telle ressource ? Idem pour l'agriculture complètement ignorée cette année puisque aucune campagne digne de ce nom n'a été entreprise pour profiter de la bonne pluviométrie en 2009. On a peut-être choisi, dans ce cadre de mettre l'accent sur le secteur traditionnel en disponibilisant aux agriculteurs 14.000 kilomètres de grillage dans le cadre d'un programme plus vaste de 74.000 kilomètres de grillage.

Comme autre inconséquence soulignée par les sénateurs, avant de voter le budget qui s'équilibre en recettes et en dépenses à 245 874 369 054 ouguiyas (1 milliard de dollars US), les allocations au niveau du département des Affaires islamiques et de l'Enseignement originel. Un sénateur a relevé qu'alors que l'Association des Ulémas et Imams de Mosquées, dont le bureau n'est jamais renouvelé, bénéficie de plus de 200 millions d'UM, chaque année, les quelques 3000 mosquées et mahadras reconnues du pays n'ont qu'une portion congrue de 34 millions d'UM !

Un autre sénateur s'est interrogé sur la nécessité de consacrer chaque année des dizaines de milliards d'UM au Budget Consolidé des Investissements (66.820.010.000 UM, en 2010) alors qu'aucune disposition n'est prise pour s'assurer de son exécution dans les règles de l'art!

Pour le reste, on peut dire que le budget 2010 ne faillit pas à la tradition, en consacrant comme les budgets précédents, des généralités sur la nécessité de lutter contre la pauvreté, de favoriser les secteurs sociaux (santé, éducation, eau, électricité, infrastructures routières) et de bien gérer les ressources publiques. Vivement le prochain budget pour voir quelle sera la réaction des citoyens après ce premier exercice de la " Mauritanie Nouvelle ".


Source: L"authentique

Vendredi 8 Janvier 2010
Boolumbal Boolumbal
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