
Dure, dure, de vivre – survivre plutôt – en Mauritanie aujourd’hui ! Chaque jour qui passe soumet les Mauritaniens à cette dure réalité : les prix flambent aujourd’hui comme ils ne l’ont jamais fait du temps de Sidioca. Les travailleurs de la Fonction publique attendent le début d’année pour être fixés sur leur sort.
Le « président des pauvres » n’a certes pas prononcé un seul mot sur une hypothétique augmentation des salaires mais tout le monde fait comme si. N’a-t-il pas, à maintes occasions, parler du souci du gouvernement d’améliorer les conditions de vie des populations ? Qu’est-ce qui se trame au niveau du ministère des Finances pour que cesse le flux et le reflux autour des logements conventionnés par l’Etat ? Les indemnités qui seront octroyées aux fonctionnaires et agents de l’Etat couvriront-elles les lourdes charges d’un loyer de plus en plus cher ?
Le répit que les travailleurs donnent au gouvernement actuel ne pourra dépasser le 31 décembre prochain. Le calme présent pourrait bien être celui qui précède la tempête. Pour que celle-ci ne renverse pas tout sur son passage, il faudrait bien que la question des salaires soit prise en compte dans les préoccupations du gouvernement. La référence dans le domaine est, depuis 2005, l’augmentation consentie par le colonel Ely Ould Mohamed Valla, alors tout nouveau président du CMJD (Conseil militaire pour la justice et la démocratie) qui cherchait à s’attirer la sympathie des classes moyennes. Une classe moyenne faite de travailleurs qui ont l’habitude de répéter : « On ne vit pas, on survit » !
Les augmentations consenties au cours des dernières années, forfaitaires (500UM, 1000UM, 8000UM) ou proportionnelles (8%, 15%, 50% du salaire indiciaire) n’ont aucune importance si on les compare à la croissance exponentielle des prix. Avec un salaire moyen de 40.000UM, la fonction publique mauritanienne ne nourrit pas son homme. Rien à voir avec « l’âge d’or » des années 70 – 80 où un professeur sortant de l’ENS n’utilisait à peine que le tiers de son salaire pour vivre comme un nabab.
Aujourd’hui, l’Etat doit penser cette question en termes de pouvoir d’achat des citoyens, non en réponse ponctuelle à des prix qui augmentent chaque jour.
L’argumentaire selon lequel l’Etat n’a pas de moyens ne tient pas pour plusieurs raisons. Le pays dispose d’énormes richesses (fer, poisson, pétrole ( !?)) mais, malheureusement, elles sont mal gérées. La SNIM seule contribue à hauteur de 12% à la formation du PIB. Elle verse, bon an mal an, au Trésor public mauritanien plus de 15 milliards d’UM. Ajoutons à cela les ressources financières de l’APD (Aide publique au Développement) censée être utilisées pour le bien-être des citoyens ? Où va cet argent ? Comment justifier l’état de précarité économique dans lequel la Mauritanie se trouve depuis le milieu des années 80 alors qu’elle a bénéficié de plus de 2 milliards de dollars US sous formes de prêts à taux très consensuels ?
L’argent destiné aux pauvres citoyens a-t-il servi à bâtir les châteaux qui émergent des dunes de sable de Tevragh-Zeïna, quartier chic de la Capitale, symbole aujourd’hui de la très mauvaise redistribution des richesses du pays ? Pour justifier vraiment le surnom de « président des pauvres, dit une secrétaire dans l’un des ministères, Aziz doit penser à augmenter sensiblement les salaires des travailleurs, surtout que, comme tout le monde le sait, ce sont eux qui constituent cette classe moyenne qui prend en charge la quasi-totalité des sans-emploi.
L’homme d’affaires, le ministre, le directeur, le chef de projet, ne sentent pas l’augmentation des prix pour une raison fort simple : ils ont d’autres « ressources », au sens propre et figuré du terme, pour parer à ce phénomène. Les autres n’ont que leurs salaires…et la Grâce de Dieu car, comme disait Fama, l’un des personnages d’Ahmadou Kourouma dans « Les soleils des Indépendances », « tant qu’Allah se trouve dans le Firmament, personne ne réussira à (le) faire crever de faim ».
Quelles solutions et à quels prix ?
Il ne suffit pas de nier la crise pour qu’elle ne fût pas ! On s’étonne à entendre certains membres du gouvernement de Moulay Ould Mohamed Laghdaf et de l’intelligentsia politico-économique affidée au pouvoir dire que la crise est désormais derrière nous.
Ce n’est pas parce que personne aujourd’hui ne parle de l’augmentation des prix, émanation la plus concrète de la fébrilité du marché, que le marasme économique n’existe que dans la tête de l’Opposition. Certains, qui ne veulent pas trop se couvrir de ridicule, cherchent à mettre tout sur le dos de la conjoncture internationale !
Il est vrai que la situation économique mondiale à une part de responsabilité dans ce qui arrive dans n’importe quel pays de la Planète Terre, et pas seulement en Mauritanie. La hausse du prix du baril de pétrole commande tout le reste : transport, industrie, agriculture, échanges commerciaux, etc. Mais elle n’entrerait pas, pour plus de 2 à 5%, dans la formation du prix final d’un produit qu’on importerait de Chine, d’Amérique ou d’Europe vers la Mauritanie. Comment justifier alors qu’un sac de riz de 50kg vendu en Mauritanie à 7000UM, il y a moins de deux ans, grimpe subitement pour atteindre 11000UM, soit une augmentation de 57,14% ? La hausse du prix du transport peut-elle justifier cette absurdité ?
Je suis plutôt tenté de dire que le « justificatif » du national par l’international a constitué, sans qu’on s’en rende compte, une sorte de laisser-aller de la part des autorités. Les entendant toujours se référer à la conjoncture internationale, le commerçant, avide de gain, ne peut résister à la tentation de gagner plus d’argent.
Autre quiproquo savamment entretenu à propos des prix : les taxes et droits de douane ! L’Etat gagnerait-il à supprimer tous ceux appliqués aux produits de première nécessité et à veiller à ce que le manque à gagner consécutif à ce « renoncement » se traduise par une baisse significative du prix de ces denrées ? Tout le monde vous dira que oui, car qui paie réellement ces droits ?
Les voies détournées pour faire partir ces ressources vers d’autres destinations « particulières » sont connues de tous. Alors autant en faire profiter les citoyens. Si cette solution radicale est inconcevable dans un Etat qui se veut moderne, alors faisons en sorte que toute baisse d’impôts et de taxes consentie aux commerçants se traduise par un nivellement vers le bas des prix de ce que nous consommons tous les jours. Sans cela, le rôle de l’Etat tiendrait en un mot : spectateur !
C’est d’autant plus vrai que la politique sociale de celui-ci n’est plus ce qu’elle était il y une vingtaine d’années. Tous les services sociaux de base sont aujourd’hui devenus des services marchands.
La santé et l’éducation coûtent cher, même dans les établissements publics. L’eau et l’électricité, quand elles existent, ajoutent au désarroi d’un citoyen pris entre les tenailles de la marmite, qui ne souffre d’être culbutée, le loyer à payer d’avance chaque mois, la scolarité « privée » des enfants, la santé d’une famille chroniquement malade à cause d’une sous-alimentation visible à l’œil nu et la parentèle pauvre à aider quand c’est vraiment possible.
Pour ne pas casser ce semblant d’équilibre social, l’Etat doit penser les salaires comme une autre manière de rendre accessibles les services de base comme le droit à la santé, à l’éducation, à l’eau et à l’électricité.
Source: l'authentique
Le « président des pauvres » n’a certes pas prononcé un seul mot sur une hypothétique augmentation des salaires mais tout le monde fait comme si. N’a-t-il pas, à maintes occasions, parler du souci du gouvernement d’améliorer les conditions de vie des populations ? Qu’est-ce qui se trame au niveau du ministère des Finances pour que cesse le flux et le reflux autour des logements conventionnés par l’Etat ? Les indemnités qui seront octroyées aux fonctionnaires et agents de l’Etat couvriront-elles les lourdes charges d’un loyer de plus en plus cher ?
Le répit que les travailleurs donnent au gouvernement actuel ne pourra dépasser le 31 décembre prochain. Le calme présent pourrait bien être celui qui précède la tempête. Pour que celle-ci ne renverse pas tout sur son passage, il faudrait bien que la question des salaires soit prise en compte dans les préoccupations du gouvernement. La référence dans le domaine est, depuis 2005, l’augmentation consentie par le colonel Ely Ould Mohamed Valla, alors tout nouveau président du CMJD (Conseil militaire pour la justice et la démocratie) qui cherchait à s’attirer la sympathie des classes moyennes. Une classe moyenne faite de travailleurs qui ont l’habitude de répéter : « On ne vit pas, on survit » !
Les augmentations consenties au cours des dernières années, forfaitaires (500UM, 1000UM, 8000UM) ou proportionnelles (8%, 15%, 50% du salaire indiciaire) n’ont aucune importance si on les compare à la croissance exponentielle des prix. Avec un salaire moyen de 40.000UM, la fonction publique mauritanienne ne nourrit pas son homme. Rien à voir avec « l’âge d’or » des années 70 – 80 où un professeur sortant de l’ENS n’utilisait à peine que le tiers de son salaire pour vivre comme un nabab.
Aujourd’hui, l’Etat doit penser cette question en termes de pouvoir d’achat des citoyens, non en réponse ponctuelle à des prix qui augmentent chaque jour.
L’argumentaire selon lequel l’Etat n’a pas de moyens ne tient pas pour plusieurs raisons. Le pays dispose d’énormes richesses (fer, poisson, pétrole ( !?)) mais, malheureusement, elles sont mal gérées. La SNIM seule contribue à hauteur de 12% à la formation du PIB. Elle verse, bon an mal an, au Trésor public mauritanien plus de 15 milliards d’UM. Ajoutons à cela les ressources financières de l’APD (Aide publique au Développement) censée être utilisées pour le bien-être des citoyens ? Où va cet argent ? Comment justifier l’état de précarité économique dans lequel la Mauritanie se trouve depuis le milieu des années 80 alors qu’elle a bénéficié de plus de 2 milliards de dollars US sous formes de prêts à taux très consensuels ?
L’argent destiné aux pauvres citoyens a-t-il servi à bâtir les châteaux qui émergent des dunes de sable de Tevragh-Zeïna, quartier chic de la Capitale, symbole aujourd’hui de la très mauvaise redistribution des richesses du pays ? Pour justifier vraiment le surnom de « président des pauvres, dit une secrétaire dans l’un des ministères, Aziz doit penser à augmenter sensiblement les salaires des travailleurs, surtout que, comme tout le monde le sait, ce sont eux qui constituent cette classe moyenne qui prend en charge la quasi-totalité des sans-emploi.
L’homme d’affaires, le ministre, le directeur, le chef de projet, ne sentent pas l’augmentation des prix pour une raison fort simple : ils ont d’autres « ressources », au sens propre et figuré du terme, pour parer à ce phénomène. Les autres n’ont que leurs salaires…et la Grâce de Dieu car, comme disait Fama, l’un des personnages d’Ahmadou Kourouma dans « Les soleils des Indépendances », « tant qu’Allah se trouve dans le Firmament, personne ne réussira à (le) faire crever de faim ».
Quelles solutions et à quels prix ?
Il ne suffit pas de nier la crise pour qu’elle ne fût pas ! On s’étonne à entendre certains membres du gouvernement de Moulay Ould Mohamed Laghdaf et de l’intelligentsia politico-économique affidée au pouvoir dire que la crise est désormais derrière nous.
Ce n’est pas parce que personne aujourd’hui ne parle de l’augmentation des prix, émanation la plus concrète de la fébrilité du marché, que le marasme économique n’existe que dans la tête de l’Opposition. Certains, qui ne veulent pas trop se couvrir de ridicule, cherchent à mettre tout sur le dos de la conjoncture internationale !
Il est vrai que la situation économique mondiale à une part de responsabilité dans ce qui arrive dans n’importe quel pays de la Planète Terre, et pas seulement en Mauritanie. La hausse du prix du baril de pétrole commande tout le reste : transport, industrie, agriculture, échanges commerciaux, etc. Mais elle n’entrerait pas, pour plus de 2 à 5%, dans la formation du prix final d’un produit qu’on importerait de Chine, d’Amérique ou d’Europe vers la Mauritanie. Comment justifier alors qu’un sac de riz de 50kg vendu en Mauritanie à 7000UM, il y a moins de deux ans, grimpe subitement pour atteindre 11000UM, soit une augmentation de 57,14% ? La hausse du prix du transport peut-elle justifier cette absurdité ?
Je suis plutôt tenté de dire que le « justificatif » du national par l’international a constitué, sans qu’on s’en rende compte, une sorte de laisser-aller de la part des autorités. Les entendant toujours se référer à la conjoncture internationale, le commerçant, avide de gain, ne peut résister à la tentation de gagner plus d’argent.
Autre quiproquo savamment entretenu à propos des prix : les taxes et droits de douane ! L’Etat gagnerait-il à supprimer tous ceux appliqués aux produits de première nécessité et à veiller à ce que le manque à gagner consécutif à ce « renoncement » se traduise par une baisse significative du prix de ces denrées ? Tout le monde vous dira que oui, car qui paie réellement ces droits ?
Les voies détournées pour faire partir ces ressources vers d’autres destinations « particulières » sont connues de tous. Alors autant en faire profiter les citoyens. Si cette solution radicale est inconcevable dans un Etat qui se veut moderne, alors faisons en sorte que toute baisse d’impôts et de taxes consentie aux commerçants se traduise par un nivellement vers le bas des prix de ce que nous consommons tous les jours. Sans cela, le rôle de l’Etat tiendrait en un mot : spectateur !
C’est d’autant plus vrai que la politique sociale de celui-ci n’est plus ce qu’elle était il y une vingtaine d’années. Tous les services sociaux de base sont aujourd’hui devenus des services marchands.
La santé et l’éducation coûtent cher, même dans les établissements publics. L’eau et l’électricité, quand elles existent, ajoutent au désarroi d’un citoyen pris entre les tenailles de la marmite, qui ne souffre d’être culbutée, le loyer à payer d’avance chaque mois, la scolarité « privée » des enfants, la santé d’une famille chroniquement malade à cause d’une sous-alimentation visible à l’œil nu et la parentèle pauvre à aider quand c’est vraiment possible.
Pour ne pas casser ce semblant d’équilibre social, l’Etat doit penser les salaires comme une autre manière de rendre accessibles les services de base comme le droit à la santé, à l’éducation, à l’eau et à l’électricité.
Source: l'authentique