Mamadou Wane : «J’écris ; je raconte mon enfance : ma souffrance»



Mamadou Wane : «J’écris ; je raconte mon enfance : ma souffrance»
Mamadou Wane, licencié en Histoire moderne, vient de publier sa première œuvre littéraire ; un recueil de poèmes intitulée : «La rive des lamentations». Avec celle-ci, il participe, à côté de sept autres auteurs mauritaniens, dans un ouvrage collectif : "Quand la sève devient lait", rédigé en Arabe, Français et Poulaar. Dans sa contribution, Wane nous rappelle que la beauté et la joie de vivre apparaissent davantage à nos yeux dans la douleur et la souffrance(Interview).


ALAKHBAR : Pourquoi êtes-vous lancé dans l’écriture ?
Mamadou Wane :
Je suis fou de l’écriture ! Mais, je dirais une seule raison et pas plusieurs ; j’ai été très top influencé par les classiques français et, finalement, l’écriture est devenue ma passion. Et voilà depuis l’adolescence je m’adonne à l’écriture.


ALAKHBAR : Que comptez-vous apporter dans la littérature mauritanienne ?
M.W :
En tout cas, je suis passionné par l’écriture, surtout la littérature ; j’ai beaucoup à raconter de mon expérience personnelle. Sur ce plan-là, je pourrai, peut-être, apporter quelque chose dans la littérature mauritanienne. Mais, j’avoue que cela ne sera pas du tout facile, parce que la littérature mauritanienne -s’elle existe, car l’expression est déjà française- n’est pas encore connue à l’extérieur.


ALAKHBAR : Dans l’ouvrage, vous parlez de lamentation, douleur, sang… Etes-vous aussi pessimistes comme d’autres écrivains négro-mauritaniens ?
M.W :
Pour écrire, j’ai pris un point de départ à savoir mon expérience vécue. Mes lamentations ne font donc que refléter ma propre vie. On peut naître avec une anomalie. C’est mon cas : depuis l’enfance, je souffre d’une maladie héréditaire (la drépanocytose). Du coup, j’ai constaté très tôt, dans ma vie, que je souffrais. Cela a beaucoup marqué mon enfance et de ce point, je suis parti avant de rentrer dans le vif du sujet. Peut-être après mes lamentations m’ont amené à parler d’autres lamentations plutôt politiques que vous verrez dans le livre.


ALAKHBAR : N’êtes vous pas contradictoire quand vous vous résignez et fuyez vos souffrances, en même temps?
M.W
: Beaucoup de lecteurs se sont rendus compte qu’il y a de la résignation dans mes écrits. Elle est peut-être inhérente au destin ; quand Dieu décide de faire de vous quelque chose, quand vous portez la douleur sur vos épaules, là c’est immuable : vous ne pourrez pas y changer grand chose. Et en tant que musulman, on ne pourra que se résigner, car on ne va pas -on ne peut d’ailleurs pas- changer la volonté divine. Ce qui ne m’empêche pas, pour autant, de progresser. Je progresse ; j’écris. Ma douleur ne m’empêchera pas d’écrire.



Seulement je me mets, d’autre part, dans la peau d’un autre personnage de mon entourage, à la place d’un autre jeune négro mauritanien. Et je rappelle au passage que si je parle d’une autre personne, j’utilise «je» ; je peux dire «je» en parlant à vous. Victor Hugo le disait : «Quand je dis «je», je parle de vous ». Alors fuir ? Y a en ceux qui fuient la misère : on voit des clandestins qui périssent dans la mer. Mais pourquoi fuir ? Moi, je préfère affronter la réalité. En revanche, je comprends ces gents s’ils abdiquent à leur responsabilité croyant qu’ils peuvent trouver meilleur ailleurs en affrontant les océans. C’est dans la peau de ces gens-là où je me suis mis pour décrire la misère dont ils souffrent.


ALAKHBAR : Pourquoi dites-vous «Partir où Dieu serait présent», n’est-il pas partout présent, Dieu?
M.W :
Dieu est omniprésent. Il est en Afrique comme à l’autre côté des océans. J’ai préféré, cependant, utiliser une nuance dans la littérature. Par exemple, je suis mauritanien, chaque jour que Dieu fait, j’affronte des problèmes sanitaires, raciaux et entre autres. Je peux, moi, retrousser les manches et affronter cette réalité. Tandis qu’un d’autre pourra croire que «son dieu», c'est-à-dire l’eldorado serait en Europe ou en Amérique. Il y a donc, Dieu avec un grand «D» qui est partout et dieu avec un petit «d» qui veut dire, pour certain, réussite et argent.


ALAKHBAR : Pourquoi écrivez-vous «Ma vie s’est obscurcie dès l’aube de la naissance» ?
M.W :
Comme je l’ai déjà dit, j’ai très tôt, dans mon enfance, ressenti la douleur : je suis drépanocytaires (un long silence). En écrivant, je me souviens toujours de mon enfance. Vous savez, il y quelque choses que je ne peux pas oublier : cette souffrance, je ne pourrais jamais l’oublier.




Dimanche 1 Janvier 2012
Boolumbal Boolumbal
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