L’esprit des remaniements en Mauritanie



L’esprit des remaniements en Mauritanie
Un remaniement ministériel ça peut s’imposer par une urgence politique ou être provoqué par les humeurs du prince. Mais jamais chez nous par l’obligation des résultats. La contre-performance n’étant pas un motif de sanction ni la démission une morale du devoir. En Mauritanie, le remaniement est le plus souvent une simple simulation de changement de la part du Président qui use de son autorité pour faire appel à d’autres hommes qui ne sont pas forcement les meilleurs et le plus souvent des cancres diplômés. Le Boss juge que le temps de placer d’autres soutiens a sonné ou sous la pression, il procède à un remaniement après que la rumeur ait circulé plusieurs jours durant. Un ministre de telle tribu s’en va, un autre vient à sa place. Un Hartani quitte, un autre est placé au même poste. Deux Kowri s’en vont, deux autres sont nommés en lieu et place. Mais à la tête du département rien ne bouge comme pour dire que le changement ne vient pas du départ de celui qui occupait le portefeuille. L’obstacle n’a pas besoin d’être identifié. Au bout du compte, les mêmes problèmes laissés par le titulaire déchu restent entiers. L’opinion publique n’arrive pas à comprendre les raisons du changement opéré en l’absence de visibilité dans l’action du gouvernement et surtout des raisons objectives d’un remaniement. Ailleurs, si un ministre quitte le gouvernement, c’est que le départ est motivé par l’insuffisance des performances ou par la démission volontaire du concerné qui estime qu’il ne peut plus donner satisfaction ou qu’il a d’autres impératifs politiques ou professionnels. En Mauritanie, tant que le chef supporte votre visage, vous pouvez espérer encore rester en place. C’est pourquoi nos ministres ont toujours la tête baissée en conseil des ministres comme des élèves dociles. Au temps de Taya, la fréquence des remaniements était due à l’ingérence des chefs de tribus dans les affaires de l’Etat. Chaque chef de « Qabila » propose son fils ou ses proches pour tirer des profits de cette nomination à caractère tribal. Il n’est pas étonnant dès lors de voir le personnel du ministère se constituer entièrement des fils de la tribu. Beaucoup de ministères s’étaient transformées en « khaima » (tentes) ne traitant que des problèmes des frères, sœurs, cousins, oncles, amis etc. Ainsi les équipes se suivent et se ressemblent. Les prétendants aux portefeuilles se bousculent à la primature et à la présidence pour réclamer leur part du gâteau pour les « illoyaux » services rendus à la Nation. Les cadres quittent en masse leurs services pour aller applaudir le président en visite dans une région laissant leurs bureaux fermés aux citoyens. Chacun vaille que vaille mettra un geste intéressé d’hospitalité à son actif. Ceux qui n’avaient pas mis pied dans la région depuis la campagne passée feront sentir leur présence. Cette habitude risque fort de ne pas changer, quelque soit le régime en Mauritanie. Ceux qui pensaient qu’avec Aziz les désertions dans les bureaux se feront rares peuvent observer la visite effectuée au Hodh El Gharbi à travers les images de la TVM .La culture de l’ascension politique par la complaisance, les fausses apparences, les interventions restera vivante tant que les pratiques politiques continueront dans la même direction. C’est par ces jeux de simulacres populistes créés par la ruée des cadres qu’un président croyant à sa popularité se fait des illusions sur des élans de sympathies qui ne correspondent pas forcement à la réalité. C’est cette mentalité qui structure l’esprit du remaniement ministériel en Mauritanie.

Cheikh Tidiane Dia

Source: Le Renovateur

Mardi 3 Août 2010
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