Faut-il aller voir Samba?



Par Marie Aimée

Forcément, Samba partait avec un gros handicap : c’était le film d’après Intouchables pour Omar Sy et les réalisateurs Eric Toledano et Olivier Nakache et tout ce qu’on sait, donc. Difficile dans ce cas d’exister autrement que sous les feux de la comparaison et, plus encore, de satisfaire un degré d’attente monstre. Alors voilà, Samba est, hélas, un peu décevant. Adapté librement du roman Samba pour la France de Delphine Coulin, (Seuil, 2011), le film s’attache à raconter comment deux êtres que tout oppose – Samba (Omar Sy), un Sénégalais sans-papiers menacé d’expulsion et Alice (Charlotte Gainsbourg), quadra CSP ++ en arrêt maladie pour burn out – vont s’aider l’un l’autre à reprendre courage. Partant de leur rencontre au sein d’une association venant bénévolement en aide aux sans-papiers, on assiste au tissage progressif de liens improbables mais sincères, tantôt par le rire, tantôt par les larmes. Pas tout à fait une comédie romantique US mais presque, trempée dans un précipité de réalisme sociologique. Avec bien sûr, en renfort, les personnages secondaires – très attachants - de Tahar Rahim et Izia Higelin, aussi légers et décomplexés que Samba et Alice sont alourdis par leurs désastres personnels respectifs.

En fait le gros problème du film tient à sa cadence narrative instable. Passée une séquence d’ouverture proprement brillante – la caméra passe de l’espace/temps bourgeois à celui des exclus, capturant en un plan-séquence le vertige inégalitaire de la société française -, le récit s’affaisse régulièrement et ce jusqu’à la fin. Pour le spectateur, elle est bizarre cette sensation d’un enchaînement chaotique et imprécis des choses. Comme si les séquences étaient nouées entre elles par des fils usés. Comme si l’histoire ramait à se raconter. Comme si, à trop vouloir imbriquer la chronique sociale et des saillies de rom com’, la fusion se révélait compliquée, pas comme celle de l’huile et l’eau mais quasi. L’ensemble souffre donc d’une sorte de mollesse plastique, la tonicité habituelle du duo Toledano-Nacache nous manque. Dommage.

Certes, leur fameux charme opère. Cette petite musique bien à eux où intelligence, drôlerie et tendresse avancent toujours de front et main dans la main contre les clichés sociologiques. Si on les découvre plus mélos, plus sentimentaux qu’avant – sujet oblige – ils sont toujours aussi fous amoureux de leurs personnages. C’est rare des réalisateurs si démonstratifs. A Omar Sy et Charlotte Gainsbourg, ils offrent ainsi une belle occasion de déployer deux anti-héros dans tous leurs retranchements inavouables : maladresse des corps, visages défaits, première rencontre ratée, et même ces moments de creux où l’être est nul, lâche et vidé. Ça fait du bien.

SOURCE:http://www.vanityfair.fr

Jeudi 16 Octobre 2014
Boolumbal Boolumbal
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