Djibril Zakaria SALL, Poète Mauritanien



Djibril Zakaria Sall est né le 23 avril 1939 à Rosso, dans la région du Trarza, au sud ouest de la Mauritanie. Sa famille, peule, est originaire de la localité de Hayré Mbar / Aere M’Bar, dans la région du Brakna, au sud ouest de la Mauritanie, entre les villes de Boghé et de Kaédi. Il suit ses études primaires à Rosso, Atar et Boghé ainsi qu’une partie au Sénégal, à Dakar. De 1953 à 1960, il poursuit ses études secondaires au célèbre Collège Moderne Xavier Coppolani, d’où sortit la première élite de la Mauritanie post-indépendante. Il continue jusqu’au baccalauréat, qu’il ne passe pas et, en 1960, devient instituteur adjoint stagiaire.

En 1961, il décide de rejoindre l’École de Police et devient Inspecteur. Il passe par l’École Fédérale de Police de Dakar et par l’École Supérieure de Police de Saint-Cyr, en France, près de la ville de Lyon. En 1965, L’Inspecteur Sall est promu Commissaire de Police. Il exercera à Rosso, Zouérate, Atar et Nouakchott avant de devenir Chef de Brigade Mobile de l’Est.

C’est aux alentours d’octobre 1967, alors qu’il est commissaire de police à Rosso, que Sall commence à écrire de la poésie. C’est la nuit qu’il rédigera ses poèmes, réveillé par l’inspiration. Il décide de les envoyer à Léopold Sédar Senghor alors président de la République du Sénégal qui lui conseille d’abandonner la rime pour se « consacrer à la poésie négro-africaine pure qui est rythme et image ». Fort de ces recommandations, il continue d’écrire et envoie à nouveau ses poèmes à Senghor, qui lui en fait une bonne critique. C’est en 1970, avec le soutien du premier président de la République Islamique de Mauritanie, Mokhtar ould Daddah, qu’il publie son premier recueil par le biais de la Société Nationale de Presse et d’Édition (la S.N.P.E. qui deviendra plus tard l’Imprimerie Nationale).

Muté à Zouerate en 1972, il découvre dans la presse française l’existence d’un concours (Concours de l’Île des Poètes de Lyon) auquel il envoie deux recueils. Deux mois après, il obtient le prix d’honneur de ce concours.

Il deviendra par la suite tour à tour Directeur de l’École Nationale de Police, Directeur Régional de la Sûreté de l’Adrar, à Atar, Directeur de la Police Judiciaire, Directeur de la Sécurité Publique et enfin Directeur du Personnel et du Matériel à la Direction Générale de la Sûreté Nationale. Entre 1968 et 1979, il participe à de nombreuses assemblées générales de l’Organisation Internationale de Police Criminelle – INTERPOL partout ans le monde (Iran, Mexique, Suède, Canada, Belgique…).

Il connaîtra deux intermèdes dans sa carrière policière. Le premier entre 1975 et 1977, durant lequel il sera détaché au Ministère de la Culture, ainsi que Tène Youssouf Gueye, pour préparer le Festival des Arts Nègres qui eut lieu en 1977 à Lagos, au Nigeria, où des poèmes à lui seront lus. À cette époque, Sall a déjà publié ses deuxième et troisième recueils (1976, Soweto ; 1977, Cimetière rectiligne), toujours avec le soutien du président ould Daddah. En 1975, alors qu’il était de passage à Washington, la revue Black World publia quelques uns de ses textes qu’elle fit traduire en anglais. Il a été primé en 1976 lors d’un concours littéraire organisé à Ouagadougou, auquel Madame Delarozière, alors directrice charismatique du Centre Culturel Français de Nouakchott, avait envoyé des textes de lui. C’est pourtant à cette date que la censure gouvernementale le frappe. Suite à une publication d’un poème intitulé « Le coup de piston » dans le Chaab, l’hebdomadaire officiel qui le sollicitait régulièrement pour des textes, on lui interdit désormais de publier en Mauritanie, arguant d’une incompatibilité avec sa profession de commissaire de police.

L’année suivante, le 8 février 1978 précisément, Djibril Sall est reçu par le président Senghor qui le met en rapport avec son conseiller culturel, Pierre Klein. Ce dernier le met à son tour en rapport avec les Nouvelles Éditions Africaines implantées à Dakar et choisit lui-même les textes qui figureront dans l’ouvrage. Le quatrième recueil de Djibril Sall, Les Yeux nus, paraîtra donc à Dakar.

Le deuxième intermède dans la carrière policière de Sall couvre la période 1982/1994, durant laquelle il sera détaché à la Communauté Économique des États d’Afrique de l’Ouest (la C.E.D.E.A.O.) en qualité de Directeur du Département des Affaires Sociales et Culturelles, basé à Lagos, au Nigeria. Ce poste, non content de lui permettre de parfaire son anglais, lui permettra aussi d’effectuer de nombreuses missions dans toute l’Afrique de l’Ouest. Au retour de ce détachement qui dura douze ans, Sall obtiendra le grade de Commissaire Principal de Police et prendra sa retraite cinq années plus tard, en avril 1999. Ces cinq années sont pourtant difficiles à vivre puisqu’il est mis en « vacances forcées » dans son village d’Hayré Mbar, les autorités prétextant de ne pas avoir besoin de lui qui était pourtant à l’époque l’un des commissaires les plus gradés et les plus formés de Mauritanie. Il profitera néanmoins du jumelage de son village avec la commune de Saint Benoît du Sault dans l’Indre, en France, pour publier un nouveau recueil, Sillons d’espoir.

Il découvre de plus avec joie que ses textes commencent à être lus et diffusés en Mauritanie, par le biais du Centre Culturel Français où une conférence sur son œuvre rassemblant plusieurs professeurs intervenants a été organisée il y a peu, mais aussi du fait de certains professeurs qui l’enseignent et l’invitent dans leurs classes. Son poème «Le village » sera même donné comme examen de maîtrise à l’Université (sans qu’il en ait été averti auparavant). Aujourd’hui, à l’initiative de l’Université de Boston, l’ensemble de son œuvre (recueils déjà publiés et inédits) est sur le point d’être rééditée dans une co-édition américano-danoise, en français, anglais, danois et norvégien. Pourtant, en Mauritanie aucun de ses textes ne figure dans un manuel scolaire, ni n’a encore été traduit en arabe. Il faut ajouter que Sall s’est aussi essayé au théâtre. Il a écrit deux pièces, l’une traitant des problèmes de voisinage, lorsqu’il était à Atar, et l’autre, Le Ccri du drogué, traitant du problème de la drogue. Les deux n’ont jamais fait l’objet de publication.

L’activité littéraire de Djibril Sall s’est aussi faite un temps en langue peule. Pendant deux, trois ans, il a écrit dans sa langue maternelle, avouant qu’il découvrait ainsi la liberté de ne plus être français comme on le lui avait inculqué à l’école, en même temps qu’il explorait les possibilités littéraires de sa langue.

Ancien expert agrée par les Tribunaux de Nouakchott, Djibril Sall a travaillé à la fin de sa vie professionnelle en tant qu’expert pour la compagnie d’Assurance et de Réassurances Atlantic Lonndongate à Nouakchott. Marié, aujourd’hui retraité et retiré dans son village Hayré M’Bar où il continue d’écrire et d’où il milite dans l’Association Mauritanienne des Droits de l’Homme, il est père de douze enfants.

Mardi 24 Mai 2016
Boolumbal Boolumbal
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